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7 février 2011 1 07 /02 /février /2011 10:50

Pourquoi on ne peut pas prédire les révolutions par les données

owni

Dans Libération, le 17 janvier dernier, Emmanuel Todd explique que l’une des causes de la révolution tunisienne est à chercher dans la diminution de l’endogamie (les mariages entre cousins) et l’augmentation de l’alphabétisation. Cette analyse a été interprétée comme la preuve que l’on pouvait prédire les révolutions en regardant uniquement les statistiques. Formidable ! Construisons un indice de la probabilité de révolution !

Cette analyse marxienne (un adjectif inventé pour désigner ceux qui suivent les idées de Karl Marx sans avoir la connotation politique de marxiste), pense l’histoire comme une science exacte. Tout comme l’eau bout à 100°C à une pression de 100 kPa, on pourrait imaginer que les révolutions se déclenchent quand l’alphabétisation atteint 95%, le nombre d’enfants par femme descend à 2 et le taux d’endogamie à 20%.

Autant de modèles que de révolutions

Cette vision alléchante d’un monde obéissant à des règles connues ne tient pas la route. La première explication coule de source : si l’on pouvait prédire les révolutions, les despotes n’auraient qu’à regarder une série d’indicateurs pour conserver le pouvoir. Ce qu’ils font, dans une certaine mesure. En décembre dernier, Bouteflika, en Algérie, a augmenté de 50% le salaire des policiers, sentant sans doute la grogne monter chez ses voisins tunisiens. En janvier, après la fuite de Ben Ali, l’émir du Koweït a offert un chèque-cadeau de 1 700 euros à tous ses sujets, y compris les nouveau-nés (nés jusqu’au 1er février).

Surtout, si le modèle imaginé par Todd fonctionne dans le cas de la Tunisie et de Égypte, il n’explique absolument pas les révolutions Géorgiennes et Ukrainiennes de 2003 et 2004. Dans ces deux pays, les taux d’alphabétisation tournaient autour de 99% depuis des décennies et le nombre d’enfants par femme était largement inférieur à 2 depuis les années 1980.

On pourrait se dire que le modèle ne vaut que pour des pays de cultures similaires. Mais, là encore, difficile de voir une ‘culture arabe’ autre qu’imaginée. Le commerce entre Tunisie et Égypte, par exemple, est plus de 70 fois inférieur à celui entre la Tunisie et l’Union Européenne (pdf). Niveau culturel également, les Tunisiens semblent plus proches de la France que de l’Égypte. À en croire Google, ils s’intéressent autant à Amr Diab, le chanteur arabe pop ayant vendu le plus d’albums de tous les temps, qu’à nos très français Amel Bent et Charles Aznavour.

Le monde arabe existe surtout sous la plume des éditorialistes occidentaux et le modèle explicatif des révolutions saucé de culturalisme ne tient pas vraiment la route.

Paris, 2007

De la révolution à l’émeute

Un autre problème tient à la définition de la révolution. Parle-t-on de mouvements visant à un changement de régime ? A un changement de gouvernement ? A une diminution du prix du pain ?

La révolution de février 1917 en Russie commença par des exigences de nourriture et s’est terminée par la mise en place d’un régime diamétralement opposé au précédent. Même chose en septembre 1989 en Allemagne de l’Est. Les manifestants de Leipzig, lors des Montagsdemo, ne demandèrent pas tout de suite la fin du régime communiste.

Dès lors, que doivent trouver les modèles ? Prédire les changements de régime après-coup en imaginant des modèles ad-hoc, ou prévenir les émeutes ? Prédire le futur a posteriori est relativement facile. Prévoir les émeutes, c’est plus difficile.

Prenons celles des banlieues en France en 2005, ou celles de la Martinique en 2009. Si le taux de chômage des jeunes (entre 20% et 55% dans ces territoires) peut être un indicateur de troubles sociaux à venir, il ne détermine rien en soi. La ville d’Auchel (62), malgré un taux de chômage supérieur à celui de Clichy-sous-Bois (23% contre 21% en 2007), ne semble pas candidate aux émeutes urbaines.

On pourrait prendre en compte plein de variables (densité du tissu urbain, origine géographique des populations, proportion de francophones, état du marché du travail etc.) qu’on n’arriverait toujours pas à créer un modèle expliquant les émeutes en Seine-Saint-Denis, aux Antilles et leur quasi-absence dans le Pas-de-Calais. Une étude de l’université de Stanford montre d’ailleurs que le principal déterminant des émeutes reste les émeutes précédentes sur le territoire. En d’autres termes, plus une ville a vu d’émeutes par le passé, plus il est probable qu’il s’en produise une.

Surtout, les émeutes sont parfois l’affirmation d’une catégorie sociale pour laquelle il n’existe pas encore d’outils de mesure. De quelles statistiques dispose-t-on sur « les jeunes des banlieues » ? Sur les békés (Blancs) antillais ? La création de nouvelles catégories sociales nécessite, de la part des observateurs (dont les journalistes), de changer de grille d’analyse pour comprendre ce qu’il se passe (ce n’est pas la pauvreté qui déclenche l’émeute).

Ce travail a été fait en 1967 par le premier des datajournalistes, Philip Meyer. Il a montré que les émeutiers de Détroit n’étaient pas des jeunes sans éducation sans autre moyen de faire entendre leur voix, mais que les diplômés s’étaient autant révolté que les non-diplômés.

Sur les émeutes de 2005 en France, rien de tel de la part des journalistes. Quelques sociologues ont mené des enquêtes, mais n’ont testé que peu d’hypothèses, comme l’origine ou la taille des familles dans les communes révoltées (dans ce livre dirigé par Hughes Lagrange ; je n’ai pas trouvé de modèle statistique dans celui dirigé par Laurent Mucchielli). Il reste du boulot pour les journalistes, si nous ne voulons pas nous cantonner à des analyses au doigt mouillé et à faire écho aux sociologues.

Photos CC Wassim Ben RhoumaNocturnales

[LIVE] Dans les rues du Caire

Dimanche 6 février

La ville du Caire est construite au bord d’un désert. La pluie est très rare. Hana me raconte que lorsqu’elle survient les Egyptiens paniquent. Les automobilistes, qui pourtant n’ont peur de rien, se rangent sur le côté de la route au moindre crachin. Hana se retrouve seule à des réunions prévues de longue date et, quand elle appelle ceux qui lui avaient donné rendez-vous, inquiète de leur absence, ils lui répondent sur un ton d’évidence : “Mais enfin, tu n’as pas vu ? Il pleut !” Les enfants ne sont pas envoyés à l’école, les magasins ferment… Hier, sous la pluie fine qui tombait sur Le Caire et nettoyait l’atmosphère des dernières traces de gaz ou de fumée, des milliers et des milliers de manifestants continuaient à faire la queue devant les entrées de la place Tahrir. Le régime doit trembler plus que jamais : le peuple cairote a bravé la pluie.

Incertitudes

Hier, j’ai ressenti pour la première fois une tension intérieure déplaisante. Jusqu’alors j’avais admiré et soutenu sans réserve les manifestants de Tahrir, ébloui par leur intelligence collective, leur gaieté, leur sagesse… Mais le changement de mentalité dans la population, qui commençait à se lasser de l’état d’urgence imposé par les manifestants, me faisait craindre très sérieusement une scission dans la population égyptienne. J’en venais à me dire qu’il valait peut-être mieux que les manifestants lâchent Tahrir et rentrent chez eux, tout en restant très vigilants vis à vis du processus politique de transition annoncé par les autorités. Vendredi, la mobilisation était ahurissante ; elle ne l’était pas moins hier. Et les mentalités ont basculé de nouveau dans les couches populaires qui subissent de plein fouet les effets de la paralysie du pays. La répression terrible de la semaine dernière, suite au discours de Moubarak, a bien révélé que le régime n’avait aucune intention de changer ses méthodes policières. Il n’en a pas fallu plus pour que les indécis repassent – au moins pour l’instant – du côté des contestataires. Maladroit pouvoir qui n’a pas compris ce qui s’était passé dans son peuple : ce régime se conduit comme un père tyrannique qui croit encore pouvoir battre son fils majeur. Il ne sait pas ce dont est capable sa propre société – le savait-elle elle-même ? Hier soir, un des jeunes qui protègent le quartier nous disait : “Moi je n’ose pas aller à Tahrir mais je suis fier de ce qu’ils font.”

Un peuple uni sur la place Tahir

Ce matin, les coptes ont prié sur Tahrir, avant de laisser la place à la prière musulmane, preuve s’il en était besoin de l’absence de sectarisme dans le mouvement. Hier, de nombreux officiels du PND ont été remplacés, dont Gamal Moubarak, le fils du dictateur autrefois promis à sa succession. De nombreuses personnalités publiques, autrefois très attachées au régime, vont se montrer sur Tahrir, jouant du coude pour se faire une petite place parmi les résistants de la dernière heure. Les rats quittent le navire. La foule de Tahrir, pacifique, immobile, énorme masse d’énergie, semble irradier autour d’elle les effets de sa puissance magnétique, annellations concentriques qui, à distance, effritent comme des chateaux de sable lêchés par la mer tous les lieux du pouvoir finissant.

La place Tahir, Le Caire -Vendredi 4 février Feb4 - 11::33

Photo CC monasosh

Avoir obtenu que le régime dialogue avec ses opposants – ce qui semble imminent – est déjà inouï. Mais ce que les manifestants ont réalisé n’est pas réductible aux institutions politiques. La révolution sociétale est sans précédent. La place n’est plus seulement un vaste slogan répété en choeur. Des lieux de débats s’y sont ouverts. La question à présent est : comment traduire dans la vie politique la force populaire révélée ces derniers jours ? Il est évident que de nombreux manifestants se sentiront dépossédés de leur révolution par le processus de transition que seule leur volonté aura pu déclencher. Ils restent sur la place comme pour dire : “N’oubliez pas qui nous sommes…” Ce peuple n’est pas architecturé selon des mots d’ordre ou des idéologies rédigées ailleurs. Il ne repose sur rien que sur sa propre unité retrouvée.

Ce matin, en marchant sur les bords du Nil, je me suis arrêté devant un des très vieux arbres qui bordent l’avenue de la Corniche. Des lianes épaisses et noueuses tombent de ses branches et atteignent le sol qu’elles finissent par craqueler puis perçer, plongeant dans la terre de nouvelles racines. L’arbre est devenu une vaste architecture de fines colonnades où le tronc ne se distingue plus de ses avatars. Il est énorme cet arbre, son ampleur est inouï, mais il semble n’être soutenu par rien, aucun tronc à sa base ne paraît assez large pour en supporter le poids. Quand on le regarde de plus loin, on a l’impression qu’il flotte, nuage de feuilles qui laisse pendre sous lui des lianes prenant racine…

Samedi 5 février

Le pouvoir égyptien joue avec nos nerfs. Il est chapitré comme un roman stratégique dont nous essaierons ces prochains jours de retracer le déroulement. Depuis hier, nous sommes entrés dans une nouvelle phase. Le discours avant-hier de Souleiman, le vice-président nommé la semaine dernière, nous a semblé abattre la dernière carte de Moubarak. Tout avait été concédé, hors son départ. Quatre millions de manifestants lui ont répondu hier. Dans l’après-midi nous avons cru que le dictateur serait démis. Rien ne s’est passé et nos spéculations nous épuisent.

La réalité des check-points

Hier dans la journée, impossible de tenir : je décide d’aller sur la place Tahrir. Si le régime tombe, je ne veux pas le voir à la télévision. On annonce des baltaguayé (ces hommes employés par la police pour commettre des actes violents et illégaux) sur l’avenue qui de chez nous mène à Tahrir. Je cherche à faire le tour par la Corniche, les quais longeant le Nil, mais toutes les rues sont barrées par des check-point de l’armée. Une rue ne l’est que par un comité de quartier que j’imagine bienveillant. Le jeune homme qui m’arrête et me demande ma pièce d’identité me fait signe de le suivre et m’amène tout droit à un militaire gradé qui, à quelques pas de là, s’ennuie avec une grande conscience professionnelle. Il tique sur les déchirures de mon jean, dont je dois lui expliquer qu’elles sont dues à la mode européenne – d’ailleurs dépassée – et non à des bagarres auxquelles j’aurais participé. Suspicieux comme son métier l’exige, il me garde vingt minutes avant de me relâcher. Je décide de passer par l’autre côté après m’être assuré auprès des comités de quartier, ceux que je connais, que le chemin était sûr. Plus loin un autre barrage militaire semble ne laisser passer personne ; je n’ose pas même le tenter : s’il dépend du même gradé, je ne voudrais pas courir le risque de me retrouver à nouveau devant lui.

Au retour les comités de quartier font des difficultés pour me laisser entrer dans la rue où je loge. Ils veulent m’accompagner et je cherche à ne pas leur faire voir où je vais. Je ne sais plus de qui je peux être sûr. Ces jeunes gens ne sont pas agressifs : depuis une semaine, ils se chargent tous les soirs du travail de la police et sont simplement agacés de devoir assurer la sécurité d’un étranger qui brave le couvre-feu. On les comprend. Je rentre sans avoir rien pu voir.

Dans la soirée, situation d’urgence : rumeur à propos d’un Français qui a reçu la visite de douze agents de la police militaire, armés et vêtus de gilets pare-balle (on n’est jamais trop prudent). Ils auraient saisi ses ordinateurs et sa caméra. Me voici sur le toit de la maison, planquant mes disques durs sous des bâches poussiéreuses. Tenant à ma sécurité et à celles des amis qui me logent – et qui ont plus à perdre que moi dans cette histoire – plus qu’à la gloire de couvrir l’évènement, je décide de ne plus tenter d’aller sur la place Tahrir. Mes sources d’information sont suffisamment nombreuses et de première main pour que je m’abstienne de mourir pour une cause qui, si j’y suis intellectuellement et affectivement impliqué, n’est pas la mienne.

 

On s’habitue à tout : la soirée est presque joyeuse. Je m’installe confortablement dans le confinement.

Un tank sur un checkpoint de civils à Maadi, Le Caire

La défiance des alliés de l’Egypte

Ce matin, annonce de l’explosion d’un pipe-line dans le Sinaï. Nous sentons que nous abordons une phase nouvelle de la crise égyptienne, où les questions stratégiques régionales vont devenir aussi déterminantes que les problèmes intérieurs. Les alliés de l’Egypte ne font plus confiance à Moubarak pour réprimer le désir de démocratie de son peuple. Sont-ils en train de s’y mettre à leur tour ? Ce matin, dans la presse internationale, on ne parle que des Frères Musulmans, pourtant très minoritaires ici. Comment leur offrir un boulevard en prétendant les combattre… Scandaleux articles pleins de contre-vérités sur les sites du Figaro et du Point. De la gauche française, nous n’attendions plus grand-chose ; mais que la droite de tradition gaulliste ne comprenne pas sa parenté politique avec les révolutions arabes, voilà qui m’accable. Alliot-Marie interdit aux chercheurs français présents en Egypte de s’exprimer dans les médias sur la situation, au nom du devoir de réserve. Elle a bien raison : si les observateurs compétents se mettent à intervenir, où va-t-on ?

Direction Zamalek

Nous décidons de sortir pour aller à Zamalek, une île sur le Nil. Pour éviter Tahrir, le taxi fait un large détour. Alors que l’avenue de la corniche est absolument déserte, le trafic a retrouvé sa traditionnelle et rassurante anarchie dès que nous passons le fleuve. Les Égyptiens ne pouvaient longtemps cesser d’être eux-mêmes. Quand, il y a quelques jours, nous avions fait un tour dans des quartiers populaires éloignés du centre, si le souk touristique était désert et ses échoppes fermées, le marché populaire qui le jouxte était bondé et abondamment achalandé. La circulation des marchandises dans cette ville est surprenante : alors qu’on fait la queue dans les magasins des quartiers bourgeois, en rupture de tout, les couches populaires, sans doute alimentées par leurs familles à la campagne, ont de quoi se nourrir.

Aujourd’hui, les habitants sont rassurés par l’allègement du couvre-feu qui commence à présent à 19 heures. Ils ont retrouvé leur amabilité naturelle. Il est temps, en marge de notre souci, de retrouver le plaisir d’être au Caire. La situation reste préoccupante. Les dangers sont innombrables pour ce mouvement populaire que de nombreuses forces tentent de diviser. Jusqu’à présent, nous n’avons pas été déçu par ce peuple, par son intelligence et sa sagesse collectives – c’est d’ailleurs une première dans ma vie d’observateur politique. Nous avons envie de continuer à lui faire confiance. Sur le chemin tout à l’heure, nous avons observé un oiseau superbe entre les grilles rouillées d’une maison coloniale abandonnée. Sa tête était surmontée d’une crête zébrée qui, partant vers l’arrière, donnait à son allure assurance et fierté. Ses ailes étaient repliées en une longue queue pointue striée de barres blanches et noires ; il les a soudain déployées pour s’envoler. La crête s’est ouverte en éventail, comme de colère. Ce petit oiseau, d’une paisible puissance, est un hud-hud, un oiseau déjà présent à l’ère pharaonique. Il est devenu rare d’en voir ; les Égyptiens disent que ça porte chance…

Vendredi 4 février

Dixième jour d’une révolution égyptienne qu’on a cru souvent victorieuse, contre un régime qui n’en finit pas de ne pas encore tomber et qui abat l’une après l’autre ses cartes répressives. Au Caire, le mouvement de protestation a principalement investi la place Tahrir, alternativement ou simultanément lieu festif, tribune politique et champ de bataille, divisée depuis deux jours en secteurs fonctionnels spontanément découpés pour permettre aux manifestants une efficacité maximale. La place, d’un côté, se prolonge en une artère plus étroite aboutissant à une deuxième place, que surmonte une bretelle de voie rapide. C’est là que la bataille s’est concentrée la nuit de la contre-révolution, entre le 2 et le 3. Elle opposait les manifestants aux forces de police en civil et aux “baltagueya”.

C’est dans l’après-midi du 2 que la place, très pacifique, a été envahie par de soi-disant “pro-Moubarak”, certains montant des chevaux et des chameaux. Les manifestants mettent immédiatement à l’écart les femmes et les enfants et sautent sur les chevaux et les dromadaires pour s’en emparer. Peu à peu, les entrées de la place sont sécurisées par des lignes de manifestants se tenant le bras tandis que les agitateurs arrêtés sont livrés à l’armée. Armée dont on ne comprend pas le rôle étrange : elle apparait parfois aux côtés de la police, allégeant ses dispositifs de contrôle et n’intervenant pas pour empêcher le massacre ; à d’autres moments, elle semble remplir son office et arrête les infiltrés, tout policiers qu’ils soient.

Un front principal se dessine peu à peu, au bout de la place, près du musée des antiquités égyptiennes. La nuit tombe. Elle va être longue. Sur le front, les manifestants se positionnent en lignes et organisent un système de relai. Les blessés partent à l’arrière et sont immédiatement remplacés par d’autres, qui attendent juste derrière. A quelques dizaines de mètres du front, une véritable industrie s’est mise en place pour fournir des projectiles aux combattants : des hommes cassent des gros blocs de trottoir qu’ils brisent ensuite en plusieurs petits morceaux en les frappant contre les barrières métalliques qui bordent la rue. Les sons des coups envahissent cette partie de la place.

De l’argent pour les pro-Moubarak

Parfois, leurs rythmes se confondent et semblent la marche au pas d’une grande armée de métal. A d’autres moments, les rythmes se distendent et évoquent une composition de musique industrielle. Sur le front, un premier manifestant a l’idée de placer à la verticale une barrière de tôle ondulée, bientôt imité par d’autres. Deux lignes de barricade sont crées en une demi-heure. A présent, les manifestants courent à l’avant lancer leurs projectiles puis repartent se réfugier derrière elles.

Les escaliers de la station de métro servent de prison provisoire pour les “pro-Moubarak” arrêtés. On trouve dans leurs poches des cartes de la police ou du PND, le parti du régime. Un immeuble, dominant le champ de bataille, a été investi par des baltagueya qui jette depuis ses fenêtres des cocktails molotov et des pierres sur les manifestants. La prise de cet immeuble devient un enjeu majeur de la bataille. Les manifestants, parvenant à s’en emparer, découvrent des habitants terrorisés. Un appartement sert de prison. Des baltagueya témoignent : on les a forcés à participer, ils ont reçu de l’argent, s’ils refusaient ils étaient battus et leurs biens étaient confisqués. Ces gens sont les plus miséreux des Égyptiens. Ils parlent des méthodes de la police avec un ton qui ne laisse pas de doute quant à leur opinion sur le régime.

A l’arrière, au cœur de la place, une clinique s’est organisée. Une rumeur circule à propos des hôpitaux : les ambulances ont été investies par la police qui s’en sert pour arrêter les manifestants. J’ai vu passer ce soir-là, dans une rue venant de la place, une curieuse ambulance conduite par des officiers et à l’arrière de laquelle des hommes assis semblaient plutôt arrêtés que blessés. Le lendemain, l’information nous a été confirmée : les blessés hospitalisés sont livrés à la police dont on connait les terribles méthodes de détention. Sur la place, décidés à ne faire confiance à personne, des docteurs soignent eux-mêmes les blessés. Ils pansent des plaies, recousent des arcades, bandent les crânes. Les blessés, allongés sur les espaces herbeux de la place, sont soignés par des femmes qui leur apportent de l’eau et de la nourriture. La grande mosquée de la rue Bolivar, à l’angle opposé du champ de bataille, est également transformée en clinique.

La place est bouclée dans les deux sens et ceux qui voudraient la quitter ne le peuvent pas. La panique monte. Certaines personnes, présentes sur la place depuis des jours, ne réagissent même plus aux coups de feu tant ils sont épuisés. La place en son centre est une grande vibration de peur qu’entourent à ses entrées des bataillons d’héroïsme.

Coordination sans leader

La voie rapide au-dessus de la rue est prise, puis perdue, puis reprise par les manifestants. Des hommes dont on soupçonne l’appartenance à la police secrète montent sur les toits et tirent à balles réelles sur les manifestants. Tant que la voie rapide n’est pas gagnée par les manifestants, des troupes de baltagueya peuvent encore grossir. Sa prise est donc primordiale. Il ne s’agit pas tant de gagner du terrain que de tenir toute la nuit en évitant un massacre. A quatre heures et demie, le pont est repris, les tirs de sniper cessent. Simultanément, le musée des antiquités est investi par les “pro-Moubarak”. Son toit leur sert également de base pour jeter sur les manifestants des cocktails molotov. Le feu prend dans une aile du musée, vite maitrisé, et dont le gouvernement accuse les manifestants. Le lendemain, l’actuel directeur des antiquités égyptiennes, membre du régime, affirmera aux médias qu’il n’en est rien, que le feu a été allumé par la police. Toute la journée d’hier, les manifestants formaient une chaine autour du musée pour le protéger, viscéralement attachés à leur trésor national et soucieux de n’être pas accusés de vandalisme.

Il est rare de pouvoir admirer sans retenue des héros que rien n’entache. Ces hommes et ces femmes, qui se coordonnent sans leader et sans mot d’ordre, réussissent à créer une armée spontanée, avec son front et son arrière-pays, et à tenir tête aux puissantes forces armées de l’état policier. Au petit jour, les voix des muezzin n’ont pas couvert les derniers coups de feu. Mais les manifestants peuvent se dire victorieux. Ils n’ont pas lâché : la place Tahrir reste leur prise.

Pendant la matinée, la place est entièrement nettoyée. Les manifestants, depuis le début, ont a cœur de donner une bonne image d’eux-mêmes. Tous les jours j’y ai vu des volontaires ramasser les ordures ou écouler l’eau d’une canalisation brisée par les batailles. La place n’a jamais été aussi propre qu’en ces jours de révolution. Peut-être est-ce ça, d’ailleurs, la révolution : se mettre à prendre soin de l’environnement collectif parce qu’on se l’est réapproprié. Les débris de trottoir sont ratissés et posés en tas devant les barricades, prêts à servir au cas où. Et les protestataires qui ont réussi à tenir toute la nuit sont rejoints peu à peu par des milliers d’autres manifestants qui, sur les lieux mêmes où les héros mourraient la veille, refont de la place un lieu festif et joyeux. Nous sommes ahuris : rien n’arrête la détermination de ces citoyens, et rien n’entame leur bonne humeur et leur pacifisme.

Si Tahrir est aux mains des manifestants – et peut-être en son cœur l’un des endroits les plus sûrs du Caire – ses environs sont infestés de baltagueya qui poursuivent ceux qui se dirigent vers la place, arrêtent les journalistes et tabassent les activistes. La bataille centrale a fait des petits dans les rues avoisinantes où les rapports de masse ne sont pas les mêmes. La journée d’hier a été égrainée par les annonces d’arrestations ciblées. Dramatique, certes, mais le mouvement ne tient plus seulement sur les épaules de ceux qui l’ont initié.

Rapport étrange à la télévision d’Etat

Tout est maintenant une question de timing où se mêlent à la fois des facteurs politiques et sociologiques. Car de nombreux Égyptiens (la majorité ?), après l’avoir massivement soutenu et en approuvant les causes, ont un rapport ambigu au mouvement. Ils ne peuvent pas s’offrir le luxe d’une ville paralysée, leur survie dépend directement de l’argent qu’ils gagnent au quotidien. Les comités de quartier en ont assez de passer des nuits blanches pour défendre la population. Il y a un désir partagé de retour à la normalité, bien compréhensible. Ce sentiment s’accompagne toujours du rapport étrange qu’ont les citoyens à la télévision d’état. Ils savent qu’elle leur ment mais retiennent tout de même les informations qu’elle délivre. Ces derniers jours, ils disaient : “De toute façon, sur Tahrir, il n’y a que des Frères Musulmans, des étrangers, et des combattants du Hamas.” Le mouvement ne doit pas perdre cette population qui ne peut plus endurer longtemps la situation de siège. Le discours d’Omar Suleiman, le vice-président nommé la semaine dernière, leur était directement destiné. Habile moment de télévision : il ne s’agissait pas d’un discours écrit et rigide face caméra mais d’un long entretien de quarante cinq minutes où le vice-président semblait chercher le mot juste et parler le langage de la vérité. Il a reconnu la légitimité des protestations, promis des réformes en profondeur et gentiment demandé aux manifestants de rentrer chez eux. Un discours qui ne peut qu’isoler davantage dans l’opinion ceux qui, très nombreux, restent encore à Tahrir.

La nuit de jeudi à vendredi à été plutôt calme. Ce matin, la place est noire de monde. Les barrages de sécurité ont été redoublés : après la fouille par l’armée, onze fouilles successives par des manifestants permettent de s’assurer qu’aucun infiltré ne pénètre la place. En ce moment même, les muezzin appellent à la prière. Quand elle sera finie, dans deux heures, de nombreux hommes sortiront des mosquées pour rejoindre les manifestants. Des rumeurs disent que Moubarak démissionnera à ce moment-là. On craint une répression sanglante. L’atmosphère est électrique mais nous ne pouvons nous empêcher de croire que ce régime, malgré tout, vit ses derniers instants. Alignés sur la place, les hommes forment une belle mosaïque de prieurs, synchronisés dans leurs mouvements. Rien n’arrêtera la détermination de ce peuple qui, dans la guerre qui l’oppose à son état, est en train de l’emporter. La foule est à présent plus nombreuse que mardi, le jour du ‘One million-man march”…

De nombreux détails de cet article ont été obtenus grâce aux renseignements et à l’aide de Hana Al-Bayaty, et aux vidéos réalisées sur le champ de bataille par Mohammed A., reporter improvisé et audacieux qui fait un travail de documentation inouï.

Crédits photo: FlickR CC: F Hussein, Florence Mohy, Flickr CC: Ahmad Hammoud

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6 février 2011 7 06 /02 /février /2011 23:53



Alliot-Marie fait taire les chercheurs français en Egypte
  Par Ludovic Lamant, Michaël Hajdenberg

Le Quai d'Orsay continue de se prendre les pieds dans les révoltes du monde
arabe. Alors que Michèle Alliot-Marie s'embourbe chaque jour davantage dans
ses affaires tunisiennes, voilà que le Quai cafouille désormais en terre
égyptienne. Le ministère vient de demander à des chercheurs français basés
en Egypte de ne plus intervenir dans les médias hexagonaux. Dans le jargon
diplomatique, il leur est demandé d'«exercer, en qualité de fonctionnaire,
leur devoir de réserve». Du jamais vu, a priori, pour des experts pourtant
précieux pour comprendre la crise en cours... Le risque serait-il trop grand
qu'ils fassent entendre une analyse divergente de la diplomatie française,
ou juste une analyse, à l'heure où la France brille surtout par ses
silences?

L'un des chercheurs français les plus actifs en Egypte vient de faire les
frais de cette mesure étonnante. Marc Lavergne, directeur du Centre d'études
et de documentation économiques, juridiques et sociales (Cedej), s'apprêtait
à intervenir sur France-24, lundi soir, lorsqu'il reçoit un appel
téléphonique de l'ambassade de France au Caire, lui demandant expressément
de garder silence dès à présent. Le géographe décide toutefois de ne pas
lâcher la chaîne au dernier moment et de répondre aux questions.

Le lendemain, c'est l'ambassadeur en personne qui l'appelle, et lui fait
comprendre qu'il a franchi la ligne jaune. Marc Lavergne lui répond qu'il a
annulé, dans la journée de mardi, une émission de France Culture et renoncé
à un direct sur RTL. «Ce chercheur est rémunéré par l'Etat et nous sommes
effectivement, en Egypte, dans une situation compliquée», confirme Yannick
Tagand, conseiller à l'ambassade de France au Caire.

Le porte-parole du Quai d'Orsay justifie la position française: «Un agent de
l'Etat français n'a pas à faire de déclaration publique à l'étranger sur la
vie intérieure d'un pays, qu'on soit chercheur, professeur ou encore
volontaire international. On a un travail très précis à faire. On doit
rester dans le périmètre de sa mission, période de crise ou pas», explique
Bernard Valero.

Pourtant, un ancien ambassadeur dans la région joint par Mediapart assure
n'avoir jamais connu pareille situation, vis-à-vis de chercheurs français,
tout au long de sa carrière.

Un autre diplomate, lui aussi spécialiste de la zone, ne voit que la
sécurité comme motif possible d'une telle consigne: «Dans ces situations
extrêmes, nous sommes amenés à prendre des décisions qui ne sont pas
parfaites. Et notre exigence de sécurité, dans ce cas précis, prime sur
l'exigence de savoir», reconnaît-il, rappelant que les journalistes
étrangers et les membres d'ONG sont pris pour cible en Egypte depuis mardi.
«L'immaturité de notre démocratie»

Pour Bernard Valero toutefois, cette mesure «n'a rien à voir avec des
questions de sécurité. C'est une règle générale».

La situation du Cedej est particulière puisqu'il s'agit d'un institut
français à l'étranger, à ce titre placé sous une double tutelle: celle du
Centre national de la recherche scientifique (CNRS), mais aussi celle du
ministère des affaires étrangères. Marc Lavergne reconnaît que la «situation
serait plus claire si nous relevions directement du ministère de la
recherche et du CNRS». Et de poursuivre: «Notre statut étonne et même
choque, comme un exemple anachronique de la centralisation française et de
l'immaturité de notre démocratie. Et la tentation existe parfois de nous
réduire au rôle de services d'appui scientifique et technique de la
coopération française, surtout en ces temps de contrainte budgétaire.»

Mais la méthode semble sans précédent dans l'Histoire récente. «Les envoyés
spéciaux français dépêchés au Caire peuvent donc interroger tous les
Français présents au Caire, sauf les chercheurs, qui sont pourtant censés
compter parmi les plus compétents pour analyser la situation...», regrette
Sylvain Kahn, producteur à France Culture, qui avait invité Marc Lavergne,
ainsi qu'un autre chercheur présent au Caire, pour intervenir dans son
émission, avant de devoir faire marche arrière, et se contenter de deux
invités en plateau, à Paris.

Au cœur de l'affaire, les usages et abus du droit de réserve. «Il est
évidemment indispensable comme garde-fou de l'administration», reconnaît
Marc Lavergne. «Mais c'est un concept qui, à peu près chaque fois qu'il est
employé, un peu comme le secret-défense, prête à discussion. En
l'occurrence, on peut se demander à quoi il s'applique: à une certaine
réserve qui s'impose s'agissant du fonctionnement d'une administration, des
dossiers qui y sont traités, et de la préservation d'intérêts supérieurs de
la nation, ou bien à des éléments d'analyse destinés à une meilleure
compréhension par le public d'événements traités par les médias, sur un
sujet complexe et étranger? Eléments d'analyse dont la production et la
diffusion sont au cœur de la mission de nos instituts...»

Depuis la fin janvier, Marc Lavergne, l'un des rares experts français sur
place, a été très sollicité par les journaux parisiens. Il a parlé, entre
autres titres, aux Inrockuptibles, à Challenges, à Sud-Ouest, ou encore à
France Culture et RFI. A chaque fois, il se livre à une critique assez ferme
de l'Egypte sous Moubarak, dénonçant la confiscation des richesses d'un pays
à bout de souffle, par une petite élite. «Que les chercheurs puissent
parfois être des poils à gratter, cela me paraît dans l'ordre des choses. Et
cela me paraît même pouvoir être un indicateur de leur pertinence. Il ne
s'agit pas de dévoiler des secrets, que de toutes façons nous ignorons, ni
de mettre en péril l'image de la France. Mais notre regard, notre rapport à
la société du pays d'accueil, sont nécessairement, espérons-le, différents
de ceux d'une mission culturelle ou diplomatique», poursuit encore Marc
Lavergne.

Sauf que son analyse semble, effectivement, à des années-lumière des propos
lisses de la ministre des affaires étrangères, lors de son dernier
déplacement en Egypte, le 22 janvier. Quelques jours après l'attentat
d'Alexandrie, qui coûta la vie à 21 personnes, elle vantait «l'Etat
égyptien, avec ses caractéristiques de démocratie et de tolérance».

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Source TERRA :
http://www.mediapart.fr/journal/international/040211/alliot-marie-fait-taire-les-chercheurs-francais-en-egypte

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6 février 2011 7 06 /02 /février /2011 19:04

La révolution égyptienne : l’armée va trancher

http://www.robertbibeau.ca/palestin...

Pourquoi le feu de la révolte populaire embrase-t-il la rue depuis Alger jusqu’au Caire ? Parce que les peuples arabes sont opprimés, exploités, sans emploi et sans pain parfois. Tous ces motifs avérés ont déjà été soulignés, mais il en demeure un autre qui constitue, à notre avis, un vecteur de changement encore plus important. Tous les pays arabes sont passés (progressivement, mais plus lentement que l’Occident) de la société patriarcale artisanale, un monde de petits entrepreneurs régionaux, à une économie marchande de livraison de ressources naturelles et de produits manufacturés à des marchés globalisés.

S’appuyant sur le pouvoir, sur les ressources de l’État et sur le pillage de leurs budgets, une couche de milliardaires, de millionnaires, de grands capitalistes, a délogé peu à peu les propriétaires fonciers et les commerçants du souk de l’administration de l’appareil étatique. Les emprunts grotesques qu’ils ont contractés (Maroc, Algérie, Tunisie, Égypte, Jordanie, Yémen, Syrie) ont servi, pour l’essentiel, à abonder trois postes budgétaires :

1) Payer l’armée, les policiers et les services de sécurité, toute une engeance répressive pour maintenir la dictature des riches. Bon an mal an, les États-Unis ont accordé 1,3 milliard d’aide au gouvernement Moubarak, essentiellement pour qu’il puisse payer cet appareil régressif.

2) Créer, supporter puis enrichir une classe de grands capitalistes qui ont fait construire des édifices et des infrastructures civiles, développé des services tertiaires, financiers et boursiers, ainsi que des moyens de transports, etc. Ces travaux ont requis le développement d’une classe ouvrière de plus en plus nombreuse et mieux formée. Quand la crise économique occidentale s’est abattue sur les pays arabes, en 2008, des milliers de travailleurs ont été jetés sur le pavé sur les ordres du FMI (1). Or, Il n’y a pas de filet de sécurité, dans ces pays dévastés où la classe des riches accapare tout et ne laisse rien pour la survie. La cellule familiale étendue, en voie de désintégration dans ces contrées en cours d’industrialisation et de tertiarisation, n’a pas permis comme auparavant de compenser les déficiences de ces états qui n’ont rien de « providentiel ».

3) Enfin, de façon moins importante, les ressources de l’État ont contribué à développer quelques institutions collectives et sociales comme les écoles, les hôpitaux, les dispensaires, les garderies, les services d’adduction d’eau, les centrales électriques, les logements, les transports publics et les autres services essentiels à la formation et la reproduction de la force de travail.

Depuis trente ans, tous ces développements, y compris la constitution d’une caste de grands capitalistes, de marchands monopolistes et de petit-bourgeois du commerce et des communications ont profondément transformé le paysage social des pays arabes (moins en Arabie Saoudite et aux Émirats Arabes Unis pour cause de rentes pétrolières immenses). Les anciens rapports de production néocoloniaux et quasi-féodaux, que les colonialistes français, britanniques et italiens avaient laissé perdurer, ont été détruits progressivement pour être remplacés par les rapports sociaux caractéristiques de l’impérialisme triomphant.

Quand un nouveaux système de production s’installe sur un territoire national, il nécessite impérativement le développement de nouveaux rapports sociaux de production, de nouveaux rapports entre les hommes et les femmes, de nouvelles structures familiales, une nouvelle répartition des responsabilités et une nouvelle distribution des pouvoirs entre les différentes classes sociales en conflit, ainsi que de nouveaux rôles pour l’État et pour ses institutions. Il entraîne l’apparition de nouvelles élites et d’une nouvelle couche de bourgeois laïcisants, phénomène qui débouche sur la remise en cause du statut et du rôle des anciennes élites, religieuses notamment, héritées du monde précédent.

Les anciens rapports sociaux néocoloniaux et semi-féodaux ont été mis à mal dans tous les pays arabes, car ils ne pouvaient survivre aux transformations de la cellule familiale et des superstructures idéologiques. Les anciennes couches sociales dégradées ont résisté et se sont accrochées au pouvoir, ce qui a suscité la résurgence de courants religieux islamistes éphémères. La crispation de courants religieux islamistes dans la plupart des pays arabes n’est pas l’indicateur d’un retour en arrière et d’une cristallisation des anciens rapports sociaux ; c’est, au contraire, le baroud d’honneur d’un ancien monde en voie de décrépitude. Dans les grandes villes industrielles arabes, la pratique religieuse recule, comme dans toutes les sociétés industrialisées.

Ce qu’Emmanuel Todd, dans un écrit récent, identifie comme étant la cause des modifications profondes de la société arabe est en réalité la résultante de ces transformations en cours, lesquelles se mesurent par des indicateurs démographiques très précis, comme les pratiques endogames, les taux d’alphabétisation et de scolarisation, particulièrement chez les femmes, le nombre d’enfants par ménage, l’âge du mariage, etc. Tous ces indicateurs attestent de l’évolution économique, industrielle, commerciale, sociale et démographique de la plupart des pays arabes, qui ont pour plusieurs désormais rejoint la « modernité » dans le sens économique du terme (2).

Une société capitaliste en expansion requiert que l’État joue son rôle de régulateur de l’économie, de bâtisseur d’infrastructures, de gestionnaire des services de formation et de reproduction de la main-d’œuvre, ainsi que d’arbitre des intérêts conflictuels entre les différentes couches de la bourgeoisie. Le rôle de répression des mouvements populaires et sociaux est censé s’atténuer si l’on sait bien utiliser l’appareil idéologique pour produire du consentement. En effet, un système capitaliste qui fonctionne bien ne tend pas à instaurer une dictature politique ou militaire qui provoque des tensions sociales, de la répression, des conflits incessants, des baisses de productivité et l’émergence d’une économie souterraine incontrôlée.

La « démocratie » parlementaire, caractérisée par l’alternance de partis au pouvoir, comme on en retrouve dans la plupart des sociétés occidentales et dans plusieurs sociétés misérables du tiers-monde, en Afrique et en Amérique du Sud, est préférable. Les libertés de parole, de publication et de manifestation, tant que le pouvoir des riches n’est pas mis en péril, sont plus convenables. Évidemment, encore faut-il que le peuple sache voter. Un jour, les Chiliens n’ont pas su utiliser le privilège « démocratique » qui leur était accordé : Pinochet le leur a retiré. Un jour, en Palestine occupée, les Palestiniens n’ont pas su apprécier le privilège « démocratique » que l’occupant sioniste leur avait concédé, et ils ont élu le Hamas : le colonisateur le leur a retiré. Un jour, en 1992, le peuple algérien pauvre a souhaité se révolter, et il a mal voté : l’armée le lui a retiré son droit de vote. Un jour, les Libanais n’ont pas usé correctement de leur privilège démocratique et ils ont voté pour le Hezbollah… Mais, cette fois-là, le pouvoir n’a pas pu leur retirer le droit de voter, car le peuple libanais était armé. C’est le particularisme du modèle libanais (3). Le Royaume saoudien n’a pas encouragé les bouleversements du gouvernement au Liban ; il les tolère, faute de pouvoir les contrer. Le nouveau Premier ministre Mikati est un milliardaire libano-syrien, et non pas saoudien, et le Hezbollah Chiite n’est pas le choix de la dynastie Wahhabite sunnite de Riyad, qui est aussi l’alliée de Tel-Aviv et qui a financé, selon Thierry Meyssan, l’agression sanguinaire contre Gaza, n’en déplaise à certains analystes tenants de la surdétermination antisioniste (4). L’idéologie sioniste n’est jamais qu’une variante régionale de l’idéologie impérialiste américaine.

Le Liban fut le premier pays à se libérer de ses anciens rapports sociaux coloniaux, un modèle pour les peuples arabes selon une enquête de la revue Slate.fr. Le multipartisme y existe depuis des années et une majorité des Arabes ayant répondu à une enquête effectuée dans plusieurs pays rêve de vivre au Liban (51%). Rien d’étonnant, le Liban est la contrée la plus tertiarisée des pays arabisés (5).

Force est d’observer que dans la plupart des soulèvements qui ont cours, en Tunisie, en Égypte, en Jordanie, en Algérie ou au Yémen, les islamistes et la hiérarchie religieuse musulmane et copte n’ont pas joué un rôle déterminant. Ce sont les autorités égyptiennes qui ont souhaité le retour d’exil d’un leader islamiste et les « Frères musulmans » ont d’abord été très réticents à soutenir le mouvement. En Tunisie, les islamistes sont à-peu-près absents, tout comme en Algérie. Quand les sionistes prétendent être inquiets du retour de la mouvance islamiste, c’est en fait un appel à ressortir ce vieil épouvantail qui servira de sortie de secours au cas, sait-on jamais, où de véritables révolutionnaires parviendraient à s’emparer de la direction des révoltes démocratiques, ce qui risque peu de se produire.

La révolution démocratique bourgeoise qui a éclaté au Maghreb et au Mashrek est bien accueillie par les anciennes puissances coloniales et par les Américains. Les Etats-Unis, cependant, l’ont compris plus rapidement et ils sont favorables à ces changements : en Égypte, ils font la promotion de leur candidat présumé, qu’ils présentent comme un grand leader de l’opposition. Ce leader autoproclamé, qui leur a déjà servi à la tête de l’Agence Internationale de l’Énergie Atomique (AIEA), a présenté son « Plan de transition du pouvoir » non pas au peuple égyptien en révolte et souffrant, mais à l’ambassadrice américaine au Caire, afin de bien signifier à qui il souhaitait plaire (6). Que cet homme soit adoubé par les « Frères musulmans », cela chaud peu aux militaires de Washington dès lors que ce prétendant défend une politique de compromission et de négociation avec Israël et en soutien aux magouilleurs-négociateurs de l’Autorité de Ramallah.

Le maintien de dictateurs usés, déconsidérés et détestés n’est pas une option pour le champion du développement des rapports impérialistes de production. Barak Obama sait mieux que personne que la seule voie, pour les pays arabes, c’est l’établissement de gouvernements bourgeois pluralistes assurant l’alternance « démocratique ». De cette façon, les clans capitalistes se surveillent et s’observent, s’entendent et se concurrencent, tout en s’assurant que les crédits gérés par l’État ne servent pas qu’à enrichir les riches sans fournir aucun service aux travailleurs et à la population, que l’on doit obligatoirement nourrir, éduquer, soigner, amuser si l’on souhaite les voir retourner au travail la semaine suivante. La roue industrielle et commerciale doit tourner et c’est à l’Etat qu’il incombe de s’en assurer.

Il demeure toutefois une source de préoccupation pour Obama : les peuples arabes sont-ils suffisamment endoctrinés et dressés pour bien user de ces libertés et comprendre que l’alternance du pouvoir parlementaire doit se faire entre un parti bourgeois et un remplaçant équivalent, un peu comme aux États-Unis entre les partis démocrate et républicain ou, en France, entre pseudo-socialistes et UMP ? Ce n’est pas évident. C’est ce danger de « dérapage démocratique » qu’Hubert Védrine, ancien ministre socialiste français des Affaires Étrangères, tentait de prévenir en indiquant que « les pays du Sud – entendez du Sud méditerranéen – ne sont pas mûrs pour la démocratie ; il a fallu plusieurs siècles pour que, nous, les Occidentaux, nous accédions à la démocratie. En attendant, les puissances européennes doivent traiter avec les États et les élites au pouvoir » (7). Selon Washington et les capitales européennes, les peuples arabes peuvent et doivent voter, mais seulement parmi les interlocuteurs désignés comme acceptables par les Américains et leurs alliés. Des candidats qui ne remettront pas en cause la politique internationale de l’Égypte, vis-à-vis d’Israël, par exemple, et qui n’auront pas de rêves d’indépendance, comme Nasser en avait. Les autres partis pourront se présenter aux élections, mais ils ne devront jamais gagner, sinon ces « libertés » seront retirées par l’armée.

C’est à cette tâche que se dévouent présentement les officines des ambassades américaines, les services secrets occidentaux, le Mossad et toute une panoplie d’agitateurs infiltrés dans les mouvements populaires arabes. De cette évolution « démocratique » et du respect des oukases Étatsuniens dépendra l’intervention musclée ou non des armées sorties des casernes et répandues dans les rues.

L’armée étant divisée en deux clans, dans « l’Égypte au bord du sang » (8), Moubarak conserve l’espoir de sauver sa dynastie déchue, mais cet espoir du vieux Rais n’aura qu’un temps très bref : sous peu, la majorité de l’État-major de l’armée fera comprendre à ce clan que son règne est terminé. Si le maintien d’une dictature réactionnaire en Égypte était le premier choix de Bush le néocon, ce n’est pas celui de l’Amérique d’Obama, pour les raisons que nous avons déjà évoquées. La démocratie parlementaire bourgeoise avec alternance est le mode de gouvernance préféré en société capitaliste.

Comme en Tunisie, c’est l’armée (égyptienne) qui jugera de ce que la petite bourgeoisie aura accompli au cours de ces jours de sursis et c’est elle qui décidera si elle doit retourner dans ses casernes ou rester sur les parvis et les marchés pour encadrer, voire sanctionner, au besoin, la « démocratie » accordée ou refusée. Les peuples arabes de Tunisie et d’Égypte auront l’autorisation de voter et ils pourront recommencer aussi souvent que souhaité, s’ils savent voter pour le candidat qu’on leur aura désigné. La petite bourgeoisie arabe et occidentale, aux anges, calmera le jeu jusqu’à la prochaine révolte populaire pour le pain, le travail, l’équité et la dignité.


 
P.S.

(1) La Tunisie et les diktats du FMI. Michel Chossudovsky. 24.01.2011. http://www.mondialisation.ca/index....
(2) La Tunisie a rejoint le modèle historique général. Emmanuel Todd. 17.01.2011. http://www.liberation.fr/monde/0101...
(3) « Rififi à Beyrouth » Le Liban au cœur de la tourmente Arabe. Robert Bibeau. 31.01.2011. http://www.robertbibeau.ca/palestin...
(4) L’Égypte au bord du sang. Thierry Meyssan. 31.01.2011. http://www.voltairenet.org/article1... (5) Quel est donc ce pays si apprécié par l’opinion publique arabe ? 27.01.2011. http://www.slate.fr/story/33311/opi...
(6) Crise en Égypte : El Baradei soumet son plan aux Américains. 1.02.2011. http://nouvelles.sympatico.ca/accue...
(7) Tunisie : Ce que les experts civilisés n’ont pas vu venir. Omar Benderra. http://www.michelcollon.info/Tunisi...
(8) L’Égypte au bord du sang. Thierry Meyssan. 31.01.2011. http://www.voltairenet.org/article1...

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6 février 2011 7 06 /02 /février /2011 18:44

Les peuples arbabes s’émancipent : La chute du mur de la peur

« Quand trop de sécheresse brûle les coeurs ; Quand la faim tord trop d’entrailles ; Quand on rentre trop de larmes ; Quand on bâillonne trop de rêves ; C’est comme quand on ajoute bois sur bois sur le bûcher ; A la fin, il suffit du bout de bois d’un esclave ;Pour faire, Dans le ciel de Dieu ; Et dans le coeur des hommes le plus énorme incendie. »
Mouloud Mammeri

Cette année 2011 est décidément une année arabe. Pour la première fois depuis plus d’un siècle, les peuples arabes s’émancipent à la fois de leurs dirigeants qui n’ont pas su et pour certains, pas pu les mener à bon port en les projetant dans le XXIe siècle. Il a fallu un espace virtuel Facebook, Twitter et plus généralement, les nouvelles technologies de l’information et de la communication pour avoir eu raison de la chape de plomb des pouvoirs. Le régime tunisien fut balayé par l’Internet. Le régime du pharaon aux pieds d’argile comprit, mais trop tard, la nécessité d’étouffer le sang de l’information qui circulait sur la Toile. En voulant museler l’Internet, il constata que la révolution était déjà dans la rue. On apprend par ailleurs, que par mesure de précaution selon, The Guardian, qui cite Akhbar al-Arab, Gamal Moubarak, aurait quitté l’Égypte avec sa femme pour aller se réfugier à Londres.

« Pour beaucoup d’observateurs, écrit Hicham Hamza, l’armée détient aujourd’hui la clé de l’avenir politique de l’Egypte. Hosni Moubarak a ainsi désigné samedi, comme Premier ministre, Ahmed Chafik, ancien commandant de l’armée de l’air et ministre sortant de l’Aviation. Il est chargé de former un nouveau gouvernement. Le changement dans la continuité. Samedi, le président égyptien Hosni Moubarak a nommé au nouveau poste de la vice-présidence, un loyaliste par excellence, l’ancien général Omar Suleïman, chef des services secrets et candidat idéal à la succession pour les Etats-Unis. Proche des milieux d’affaires, Omar Suleïman est reconnu comme un partenaire estimable pour les Américains et les Israéliens. Ses accointances au sein de la classe politique israélienne sont également jugées rassurantes pa gouvernement de Benjamin Netanyahu. (..) l’enjeu sera de savoir si la tutelle de l’Occident sera maintenue ou bien si les aspirations démocratiques du peuple à l’autonomie pourront enfin s’exprimer.(1)

Le régime du Pharaon aux pieds d’argile

Comment ce vent de révolte a-t-il soufflé ? A côté du mimétisme de la révolte des jeunes Tunisiens, il ne faut pas négliger aussi le rôle de ferment joué par les câbles de wikiLeaks, et la crise des matières premières (on dit que l’Algérie et l’Egypte sont les deux premiers pays à acheter du blé aux pays qui le produisent, il y a au moins ce record que nous devons homologuer dans le livre des Guinness). Pour le reste, le Monde arabe est dernier partout et, notamment dans le domaine des sciences et de la technologie (500 université musulmanes, dans les dernières places, 5000 universités aux Etats-Unis Les 100 premières sont américaines et sur les 1000 premières universités mondiales 500 sont américaines. Le gap de plus en plus important entre les potentats installés dans les temps morts et un Occident exubérant d’initiative et de créativité.

Un autre paramètre est la défaillance totale de tous les partis politiques ou supposés tels dans les pays arabes, alliés traditionnels du pouvoir, leur appel à mobilisation débouche sur des flops. On remarque que les tentatives de récupération en Algérie, Tunisie et Egypte se sont soldées par des échecs patents. Ajoutons le catalyseur et l’humiliation continuelle des Arabes à travers la politique d’apartheid d’Israël envers les Palestiniens et à son impunité imposée par un Occident qui développe justement, avec les potentats arabes qu’il soutient, des relations privilégiées. A titre d’exemple, l’Egypte est inféodée aux Etats-Unis, le prix de sa reddition en rase campagne est de 1,3 milliard de dollars.

Pierre Haski explique les analogies et les dissemblances des révolutions arabes d’avec celles des pays de l’Est en 1989. « Depuis le départ du président tunisien Ben Ali et la « contagion » dans d’autres pays arabes, la comparaison a souvent été faite avec la chute du mur de Berlin, en octobre 1989.(...) La principale différence, évidemment, tient au fait que les pays communistes d’Europe centrale et orientale appartenaient à un même « bloc », dont le centre de contrôle se trouvait à Moscou, au Kremlin. Lorsque ce dernier, sous la direction de Mikhaïl Gorbatchev, a laissé faire, la voie était soudain libre pour des changements historiques....Le Monde arabe n’a aucune de ces caractéristiques : ce n’est pas un bloc homogène. (...) »

L’Egypte est inféodée aux Etats-Unis

Pierre Haski ajoute que l’Occident est inquiet et on le comprend : « Et le monde extérieur est partagé entre le soutien aux aspirations démocratiques des manifestants, et la peur de voir ces pays tomber entre les mains d’extrémistes religieux, et donc de devenir des foyers d’instabilité et potentiellement « ennemis ».La Tunisie est un petit pays, sans enjeu stratégique majeur, et les événements ont pu suivre leur cours sans grande interférence extérieure. En revanche, ce qui est sûr, c’est que les grandes puissances de ce monde observent avec inquiétude ces événements, au lieu de se réjouir de voir un vent de demande de liberté souffler sur une partie du monde qui semblait condamnée pour longtemps à l’immobilisme, la médiocrité de despotes galonnés ou couronnés, et à la menace de l’obscurantisme politico-religieux. Cette inquiétude, perceptible de Washington à Paris, nul ne sait où va la révolution égyptienne en marche. Avec, évidemment, l’incertitude islamiste. Un renversement éventuel de Moubarak ouvrira-t-il la voie à une victoire des Frères musulmans, à l’histoire longue de près d’un siècle, et très enracinés en Egypte ou en Jordanie ? Ce n’est pas ce que souhaitent les Américains, ou leurs voisins israéliens, une position qui agace les « dissidents » démocrates du Monde arabe qui n’en peuvent plus d’être confrontés à l’alternative, islamistes ou dictateurs...L’analyste conservateur, Robert, Kaplan écrivait dans le New York Times qu’il ne fallait pas trop se réjouir des événements du Monde arabe, car on finirait par regretter des « dirigeants avisés » comme le roi Abdallah de Jordanie, ou « stables » comme le président Moubarak. Et de rappeler que ce sont des élections démocratiques qui ont amené le Hamas au pouvoir à Ghaza. Ils ont fait voler en éclats le mur de Berlin dans leurs têtes, qui les empêchait jusque-là de contester des régimes autoritaires et largement corrompus, soutenus par les Occidentaux au nom de la lutte contre l’intégrisme religieux. »(2)

Alain Gresh rappelle, pour sa part, les causes structurelles voire le ferment des révoltes. Ecoutons-le : « D’abord, le maintien de régimes autoritaires qui ne rendent jamais de comptes à leurs citoyens. S’il existe (ou plutôt existait) une « exception arabe », c’était bien celle-ci : ces régimes ont connu une longévité sans précédent, M.Moubarak est président depuis 1982, M.Ali Abdallah Saleh dirige le Yémen depuis 1978 et, à Amman, Abdallah II a succédé en 1999 à son père, qui, lui-même, avait accédé au pouvoir en 1952. Pour ne pas parler de la Syrie où Bachar El-Assad a remplacé son père qui avait pris le pouvoir en 1970, ou du Maroc où le roi Mohammed VI a remplacé son père en 1999, celui-ci ayant régné à partir de 1961, de la Libye où El Gueddafi sévit depuis 1969 et prépare son fils à lui succéder. Quant à M.Ben Ali, il présidait sans partage depuis 1989. (3) De plus, dans des conditions différentes selon chaque pays, les droits individuels, politiques et d’expression du citoyen sont bafoués. La publication par WikiLeaks des télégrammes venus de l’ambassade des Etats-Unis au Caire confirment ce que tout le monde savait. (...) Tous ces régimes ont accaparé non seulement le pouvoir politique, mais se sont imposés dans le domaine économique, agissant souvent en vrais prédateurs des richesses nationales, comme en Tunisie. (...) On peut noter aussi que la lutte contre Israël, qui offrait souvent aux régimes du Proche-Orient un argument pour maintenir leur emprise - au nom de l’unité contre l’ennemi sioniste -, ne semble plus suffire.(...) l’ensemble du Monde arabe semble bien incapable de réagir au lent écrasement des Palestiniens. (....) »(4)

« Et maintenant ? Que feront les Frères musulmans, très réticents à entrer dans une confrontation avec le pourvoir et qui ont finalement décidé de se rallier au mouvement ? Mohammed El-Baradeï, sera-t-il capable de fédérer les oppositions ? « Les Palestinian Papers (ie documents WikiLeaks - NdT) écrit Robert Fisk, sont aussi stupéfiants que la Déclaration de Balfour. L’ « Autorité » palestinienne était prête, et l’est encore, à abandonner le « droit au retour » de peut-être sept millions de réfugiés vers ce qui est actuellement Israël en échange d’un « Etat » qui ne couvrirait plus que 10% (au mieux) du territoire palestinien sous mandat britannique. Il se passe quelque chose d’exceptionnel dans le Monde arabe. (...) En Égypte, nous aimons la démocratie. Nous avons encouragé la démocratie en Égypte - jusqu’à ce que les Egyptiens décident de renverser la monarchie. Alors, nous les avons mis en prison. Puis nous avons exigé encore plus de démocratie. C’est toujours la même histoire. Tout comme nous voulions la démocratie pour les Palestiniens à condition qu’ils votent pour les bons candidats, nous voulions aussi faire profiter de notre démocratie aux Égyptiens. Maintenant, au Liban, il apparaît qu’une « démocratie » libanaise va s’imposer. Et ça, nous n’aimons pas ». (4)

« Car, évidemment, nous voulons que les Libanais votent pour ceux que nous aimons, les partisans sunnites de Rafic Hariri dont l’assassinat - croyons nous - fut orchestré par les Syriens. Que se passe-t-il ? Se pourrait-il que le Monde arabe décide de se choisir lui-même ses dirigeants ? Se pourrait-il que nous assistions à l’émergence d’un Monde arabe qui ne serait plus contrôlé par l’Occident ? En Égypte, l’avenir de Hosni Moubarak paraît encore plus compromis. Et les Égyptiens n’en veulent pas du fils de Hosni. Le chef de la sécurité de Hosni, un certain Suleïman, qui est très malade, n’est peut-être pas non plus l’homme qu’il faut. Et pendant ce temps, à travers tout le Moyen-Orient arabe, nous attendons la chute des alliés de l’Amérique. En Égypte, M.Moubarak doit déjà être en train de se chercher une destination vers où s’envoler. Au Liban, les amis de l’Amérique s’effondrent. C’est la fin des « Démocrates » du Moyen-Orient arabe. Nous ne savons pas de quoi l’avenir sera fait. Seule l’histoire nous le dira. »(4)

Pour Mohamed Tahar Bensaâda, l’alternative posée à l’Occident est simple : c’est soit les barbus soit les blindés. Cela nous rappelle la phrase de Moubarak à l’Occident, c’est moi ou l’Algérie sous- entendu le chaos. « (...) Bien avant le soulèvement populaire, et comme l’ont si bien illustré les fuites de WikiLeaks, les Américains ont montré qu’ils étaient excédés par les pratiques maffieuses du clan Ben (...) Comme leurs porte-parole dans l’Hexagone, les diplomates israéliens n’ont pas hésité à regretter la chute du régime de Ben Ali et à pointer du doigt la « menace islamiste ». L’Egypte et la Jordanie, deux pays qui ne partagent pas seulement la proximité géographique avec l’Etat d’Israël. Tous les deux ont fait une « paix séparée » avec l’Etat hébreu. (...) Dans le Soudan voisin, (...) la manipulation israélo-occidentale de l’aspiration du Sud à l’autodétermination, à la liberté et au développement, a réussi, aidée en cela par l’irresponsabilité criminelle d’un pouvoir nordiste, sourd aux appels à la liberté, à la justice et à l’égalité des populations d’un Sud marginalisé et méprisé. (...)(5)

Que fera l’Occident qui avait, définitivement, misé sur « la fin de l’histoire pour les Arabes » réduits à des esclaves résignés avec un prévôt adoubé pour les maintenir en respect ? Les peuples arabes lèvent la tête et s’interrogent sur l’avenir. Sans vouloir jouer les pythies, imaginons que les jeunes Arabes vont au bout de leurs rêves. Qu’ils arrivent à élire et à faire émerger en leur sein des guides capables de leur indiquer le chemin dans la dignité, l’espoir pour tous. Pourtant, on peut craindre que ce ras-le-bol soit une révolte malheureusement, non structurée qui risque de déboucher sur une anarchie nihiliste en l’absence d’alternatives crédibles comme c’est le cas en Tunisie où la contestation continue, pour continuer.

Les gouvernements arabes sont dociles

C’est l’avis du journaliste britannique Robert Fisk, pour qui, le changement de régime en Tunisie n’annonce pas forcément l’avènement d’une démocratie. « Serait-ce la fin de l’âge des dictateurs dans le Monde arabe ? s’interroge Robert Fisk. Tous ces cheikhs et ces émirs, ces rois (dont un très âgé en Arabie Saoudite et un jeune en Jordanie), ces présidents (là encore, un très âgé en Egypte et un jeune en Syrie) doivent sans aucun doute trembler dans leurs bottes, car les événements de Tunisie n’étaient pas censés se produire. (...)Si de tels événements peuvent se produire dans un pays touristique comme la Tunisie, ils peuvent survenir n’importe où....La vérité est que le Monde arabe est si sclérosé, si corrompu, si humilié et si impitoyable -et si incapable d’accomplir des progrès sociaux et politiques que les chances sont quasi nulles de voir émerger des démocraties viables dans le chaos qui règne dans le Monde arabe. Mais tous les dictateurs savent qu’ils courent de gros dangers quand ils libèrent leurs compatriotes de leurs chaînes. Et les Arabes n’ont pas dérogé à la règle. Non, tout bien considéré, je ne pense pas que le temps des dictateurs arabes soit révolu. Les Occidentaux y veilleront. »(6)

Il est vrai que les gouvernements arabes actuels n’intéressent l’Occident que dans la mesure où ils sont dociles et non pas en tant que valeur ajoutée issue d’un brain- storming mais en tant que dépositaires d’une rente et prévôts des peuples qu’ils sont chargés de mater, en respectant un vernis de démocratie. Les dirigeants arabes, pour la plupart mal élus, s’accrochent au pouvoir à l’instar d’un El Gueddafi qui est, à n’en point douter », un cas d’école tant il est vrai qu’il a réussi à casser le peuple libyen et surtout sa jeunesse.

Pourtant, le croyons-nous, quelque chose d’absolument nouveau a eu lieu, le temps travaille pour l’avenir des millions de jeunes Arabes. Nul doute que la géopolitique mondiale connaîtra un véritable séisme et ce sera véritablement le chaos si les nouveaux Arabes décidaient enfin, de ne plus prendre comme parole d’Evangile les injonctions de l’Occident. Peut-être que c’est aussi, l’occasion unique pour rendre justice au peuple palestinien si le Monde arabe, dans son ensemble, décidait de dire « ça suffit ! » concernant les coupables complicités de l’Occident vis-à-vis d’Israël. Les peuples arabes s’émancipent, le mur de la peur est tombé.

Plus rien ne sera jamais comme avant. Peuple des beaux départs, et feu de paille qualifiait Lawrence d’Arabie les révoltes arabes . C’est différent, ce feu de paille risque d’embraser le monde, car il est porté par une jeunesse capable du meilleur comme du pire et cela les stratèges occidentaux ne l’avaient pas prévu. Comme on le constate à leur affolement, ils n’ont pas de plan « B » sauf à suivre les évènements au lieu de les anticiper, engoncés dans leur certitude que rien d’important ne viendra de l’Orient arabe embué dans ses vapeurs de narguilé et ayant arrêté sa marche vers le progrès , il y a de cela quelques siècles. Si les masses arabes, principalement les jeunes ne saisissent pas cette opportunité d’une nouvelle re-naissance, nous allons repartir , cette fois-çi et définitivement, vers les temps morts, en sortant de l’histoire malgré la nouvelle certitude , dans un réflexe totalement paternaliste, du sherpa de Nicolas Sarkozy Henri Gaino, qui concède aux Nord Africains, le fait d’être rentré dans l’histoire.. (enfin) . Arrogante certittude quand tu nous tiens !!!

Professeur Chems Eddien Chitour

Ecole Polytechnique enp-edu.dz

 

 
P.S.

1.Hicham Hamza : Le nouveau vice-président favori des Américains Oumma.com 29.01.2011

2.Pierre Haski : Le Monde arabe vit sa chute du mur de Berlin Rue89 29.01.2011

3.Alain Gresh:Le Monde arabe se révolte Monde diplomatique 28 janvier 2011

4.Robert Fisk : Une vérité émerge du Monde arabe http://www.independent.co.uk/opinio...

5.Mohamed Tahar Bensaâda Les barbus ou les blindés : l’Islam a bon dos. Quelles perspectives de changement dans le Monde arabe ? Oumma.com 27 janvier 2011

6.Robert Fisk. Le temps des dictateurs n’est pas révolu. The Independent dans Courrier international 29.01.2011.

 
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6 février 2011 7 06 /02 /février /2011 14:16

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CHRONIQUE DU MONDE ARABE

La peur au ventre

Tous les régimes arabes passeront irréversiblement à la casserole tôt ou tard

Chronique du monde arabe

par Chérif BOUDELAL - 4 février 2011 - immigrationstorys@yahoo.fr

Quand les peuples se réveilleront leurs bourreaux trembleront.

Laissez-nous juste terminer nos mandats, nous ne nous représenteront plus aux élections présidentielles, nos enfants ne se présenteront pas non plus. Nous levons l’état d’urgence, nous faisons baisser les prix, luttons contre la corruption et proclamons même la démocratie, etc. Telles sont les implorations et promesses des tyrans arabes aujourd’hui après le tsunami de la Tunisie et de l’Egypte notamment. Ces promesses ont été d’abord faites par le sanguinaire Ben Ali, le bourreau du peuple tunisien (vingt trois ans au pouvoir), puis par Moubarak, le tyran des Egyptiens (trente ans au pouvoir), et puis par Ali Abdellah Salah (trente deux ans au pouvoir), ou encore la volte face de Bouteflika qui a fait baisser les prix et fait d’autres concessions pour calmer le peuple en colère. Tous ces présidents cités sont des ex-militaires « travestis en civils » dont la carrière présidentielle est illimitée ; et même quand la
constitution limite les mandats, ils l’arrangent à leur profit pour demeurer au pouvoir à vie, ou le donner à un héritier lorsqu’ils ne peuvent plus bouger.

Ils sont des monarques sans titre et/ou des présidents sans légitimité. Quant aux monarques attitrés, où un semblant de démocratie existe, leurs peuples vident leur colère sur les gouvernements élus « démocratiquement » dont les dirigeants proviennent souvent des partis dits d’opposition, comme en Jordanie ou au Maroc. Dans ces pays, on est certes libre de critiquer les gouvernements tant qu’on ne dépasse pas la ligne rouge, c’est-à-dire de critiquer les rois, puisque ces derniers sont généralement des descendants directs de la famille du prophète, ou prétendant l’être ; et donc ils ne sont pas sujets aux critiques. C’est une règle dans l’islam, ou plutôt ce qu’est inculqué aux peuples ; on n’a pas le droit de critiquer tout ce qui vient du côté de la famille du prophète (c’est le cas des royaumes d’Arabie Saoudite, de Jordanie et du Maroc). Et dans ce cas précis, l’immunité de la famille royale est totale,
les sujets doivent s’abstenir de la critiquer même si ses membres commettent des injustices les plus aveugles ou des crimes moraux ou physiques les plus barbares.

Que les royalistes me pardonnent de dire que leurs rois, s’ils persistent dans leurs politiques de mépris envers leurs peuples dont la majorité d’entre eux ne mangent pas à leur faim, ils finiront tôt ou tard par passer casserole comme les autres bourreaux de leurs acabits. Comme dit l’adage « trop de pression provoque l’explosion », et les peuples arabes, en majorité écrasante, en ont déjà beaucoup trop que le seuil tolérable.

Dernières nouvelles

Egypte

En Egypte, ce « vendredi de la colère » a vu manifester encore des millions dans toutes les villes du pays. Sur la place Tahrir, au centre du Caire, il y avait plus de deux millions de manifestants ; à Alexandrie environ un million et dans les autres villes le nombre varie entre des dizaines et des centaines de milliers. Malgré la détermination des manifestants, la situation reste inchangée au palais « royaliste » de Moubarak. Lors d’un entretien téléphonique avec Obama, Moubarak aurait affirmé (d’après Al Jazeera) qu’il était prêt à démissionner, mais il a « peur que le pouvoir tombe entre les mains des frères musulmans qui mèneront le pays à la dérive ». Moubarak joue désespérément sa dernière carte en jouant sur les sentiments des « anti-terroristes » occidentaux, en espérant faire changer d’avis des USA et de ses alliés pour renverser la vapeur en sa faveur. Mais ces derniers voient en lui un cadavre encombrant,
ils essaient plutôt de s’accrocher aux fringues des futurs nouveaux dirigeants qui accéderont au pouvoir instamment afin de préserver leurs intérêts, et peut-être leur domination sur la politique du nouveau régime.

Pour rassurer les occidentaux et mettre Moubarak dos au mur, les dirigeants des frères musulmans ont affirmé qu’ils n’ont aucunement l’intention de présenter une candidature aux élections présidentielles, ni ne participer au prochain gouvernement. Quant aux peuple égyptien, il est déterminé à continuer ses manifestations et rassemblements jusqu’à la victoire totale, c’est-à-dire jusqu’à ce que Moubarak démissionne des ses fonctions de président. Les manifestations de soutien à la révolution égyptienne se multiplient à travers le monde, aussi bien en en Occident qu’en Orient.

Les milices de Moubarak font la chasse aux journalistes en général, et aux journalistes étrangers en particulier, car ils ne veulent pas qu’ils montrent les marées humaines qui rejettent le système et réclament la démission de leur bourreau. Ils ont une haine particulière envers les journalistes d’Al Jazeera, car cette chaîne couvre les événements vingt quatre heures sur vingt quatre, et passe les images en direct. Le régime ne veut pas non plus qu’ils montrent la brutalité que ces milices exercent contre les manifestants. Le vice président, Omar Sulaiman, a « regretté » que « des pays amis permettent à des chaînes de télévision de dénigrer l’Egypte », sans nommer toutefois la chaîne qatarie.

Dernière nouvelles du Caire

Le ministère de la santé donne les nombres de morts et de blessés de la semaine : onze morts dans les affrontements d’hier jeudi, lors de l’attaque des milices du régime contre les manifestants de la place Tahrir, cinq mille blessés comptabilisés (depuis vendredi dernier) dont beaucoup d’entre eux sont dans un état grave, d’autres dans un état très graves. La chaine de TV Al Jazeera a montré pour la première fois une voiture portant la plaque diplomatique fonçant à toute allure sur la foule, tuant et blessant plusieurs personnes. Cette image a été prise le 28 janvier, près de la place Tahrir, par un amateur d’Internet qui l’a publiée sur Facebook. Elle a montré aussi un fourgon de police qui fonçait sur des manifestants en renversant plusieurs d’entre eux. Les manifestants ont arrêté plusieurs miliciens du régime dont certains avaient des cartes de policiers sur eux, occupant des voitures bourrées d’armes.

Yémen

Au Yémen, les manifestations continuent de façon sporadique depuis plusieurs semaines. Ce vendredi il y aurait plus de cent mille manifestants à Sanaa qui réclament le départ de leur bourreau, Ali Abdellah Salah. Bien que ce dernier ait promis de ne plus se présenter aux élections présidentielles prochaines, les manifestants veulent sa démission immédiate. Les policiers et miliciens du régime ont agressé les manifestants et arrêté plusieurs s d’entre eux.

Algérie

Le président algérien, Abdelaziz Bouteflika a créé la surprise par sa déclaration, quelque peu tardive, de lever l’état d’urgence (en place depuis 1992). Par ailleurs, il a donné l’ordre aux médias étatiques (radios et télévisions notamment) « d’assurer » désormais la couverture des activités de l'ensemble des partis politiques légaux, entre autres, en leur ouvrant de « façon équitable » leurs canaux, selon l'Agence de presse APS. Sachant que ces médias n’avaient pour rôle que de vanter le pouvoir en place et les partis qui le soutiennent.

La surprise ne vient pas du fait qu’il ait déclaré la levée de l’état d’urgence, mais elle vient plutôt de sa reconnaissance implicite d’avoir exercé une politique antidémocratique sur son peuple depuis son arrivée au pouvoir en 1999.

Par cet ordre officiel donné aux médias pour ouvrir leurs canaux à l’opposition, il a reconnu avoir muselé le peuple algérien durant sa présidence dont le troisième mandat encours expirera en 2014. Il convient de rappeler quand même que Bouteflika est le plus démuni en matière d’ancienneté au pouvoir par rapport au aux autres présidents arabes, puisqu’il n’aura (meskine) que quinze ans au pouvoir au terme de son mandat !

Bouteflika a fait une erreur monumentale, celle d’avoir exclu la capitale, Alger, de cette levée de l’état d’urgence ; mais aussi d’avoir marginalisé des partis politiques « non reconnus », notamment « les islamistes », comme si leurs adhérents n’étaient pas des citoyens comme les autres. Ceci montre qu’il n’a rien compris dans la politique sociale et sociologique du peuple algérien qui n’a fait qu’une hibernation passagère dont le réveil ne doit pas tarder si les injustices sociales et politiques continuaient à sévir au sein des masses populaires laissées pour compte.

Si j’ai un conseil à donner à Bouteflika, en tant que citoyen algérien, c’est de lui recommander de lever toute interdiction sur le peuple ; mais aussi de s’adresser aux Algériens pour leur dire qu’il ne se présentera plus aux élections présidentielles à venir. De leur dire également qu’il n’est qu’un pion entre les mains de quelques généraux qui se partagent les secteurs économiques du pays, provoquant le chômage chez beaucoup de citoyens, obligeant nombre d’entre eux à fuir le pays quand ils le peuvent, et d’autres à se résigner à faire le « trabando » pour faire vivre leurs familles.

Le tsunami populaire mettra fin aux dictateurs du monde arabe

Tous les rois et président-rois dits arabes ont perdu leur sommeil en voyant le raz de marée qui a emporté Ben Ali, mais aussi Moubarak qui est en train de faire ses valises et négocie son départ avec ses maître d’hier (les dirigeant des USA) qui le remercient cyniquement pour ses bons et loyaux services.

Tous ces régimes gouvernent leurs peuples avec une main de fer, se croyant propriétaires éternels de leur pays, alors qu’ils ne sont que des tigres en papier, comme disait Mao Zedong. Dans tous ces pays où les peuples veulent en finir avec leurs tortionnaires, on assiste à un changement à bâton rompu dans les discours des dirigeants arabes ; chacun de ces tyrans au pouvoir espère qu’il en soit épargné, en prenant des initiatives de « réformer leurs politiques ». Il a fallu que des centaines de morts et des milliers de blessés (en Tunisie et en Egypte) pour que ces bourreaux acceptent « d‘instaurer la démocratie », alors qu’ils étaient sourds aux nombreux appels de détresse de leurs peuples qui souffraient de leurs jougs. De qui se moque-t-on ? Peut-on croire que les dictateurs d’hier puissent devenir des démocrates aujourd’hui ou demain ?

Après les Tunisiens, les Egyptiens et les Yéménites sont en train de transformer le visage de leurs systèmes politique, voire de leurs sociétés. A qui sera le tour dans les jours, les semaines ou les mois à venir ? C’est difficile de répondre à cette question puisque le tsunami est généralement imprévisible et prend de cout toutes les prévisions. Mais on peut imaginer que tous les bourreaux sont en trin de préparer leurs valises, car « Arrahil - le départ » est devenu irréversible pour eux tôt ou tard. Il n’y a plus de palace aux tyrans dans ce monde arabe dont les peuples n’en peuvent plus.

Les peuples veulent s’émanciper et pouvoir choisir démocratiquement ceux qui les gouvernent ; ils veulent vivre libres et dignes, ayant un pouvoir qui instaure une justice pour tous sur le même pied d’égalité. Ils ne veulent plus que leurs richesses soient partagées entre des bandes de voleurs au pouvoir qui n’ont aucune gêne de vivre dans l’opulence, alors que la majorité du peuple vit en dessous du seuil de pauvreté. Enfin, ils veulent vivre dans un système politique et social juste, où les richesses nationales doivent être réparties équitablement sur l’ensemble des citoyens.

L’Histoire nous a appris que les justes luttes des peuples sont invincibles, et la victoire de chacune d’entre elle est irréversible. Que le combat pour l’émancipation des peuples arabes continue jusqu’à la victoire finale, car les droits ne se donnent pas mais ils s’arrachent.

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6 février 2011 7 06 /02 /février /2011 14:13


 

tunisia

L’étincelle qui a mis le feu aux branches sèches de la rage du peuple de Tunis a été l’immolation par le feu de Mohammed Bouazizi âgé de 26 ans, le 17 Décembre à Sidi Bouzid. Le jeune homme étudiant en informatique a pris sa décision quand les autorités ont confisqué son gagne- pain de banc de légumes. Cette nouvelle a causé le soulèvement populaire qui a duré pendant des semaines et continue encore maintenant et qui a eu pour résultat le départ de l’Ancien Président.

 

La Tunisie est un des plus riches pays du Nord de l’Afrique. Un rapport récent du FMI mentionne qu’en 2010 le PIB du pays a atteint 4°/° comparé au 3,1°/° en 2009 et que la croissance économique a atteint 4,8 °/°,que les secteurs de technologie informatique et de l’industrie des hydrocarbures ont atteint 16°/° et 13°/° et que le taux du PIB annuel par personne est estimé à6,254 dollars; un des plus «acceptables» de la région.

 

Selon ce rapport la Tunisie est «l’économie la plus compétitive, en Afrique»et occupe le 40ème rang internationalement.

 

Sur les directives du FMI, la Tunisie a pendant ces 20 dernières années implanté un programme politique qui inclut: la privatisation des entreprises (plus de 160 ont été complètement ou partiellement privatisées), la vente ou la location d’un grand nombre d’hectares de terrain à des propriétaires privés.

12°/° du revenu de l’état vient du tourisme faisant de la Tunisie "la Suisse de l’Afrique du Nord" comme disent les médias avec 6 ports commerciaux modernes et 7 aéroports internationaux!

 

Cette politique a eu comme résultat l’enrichissement de Ben Ali et des membres de sa famille.

Le gouvernement tunisien a été un ardent support de la «guerre contre le terrorisme» que le gouvernement des Etats Unis a lancé, et a promu les affaires avec les multinationales américaines et est un partenaire de l’Union Européenne et particulièrement de la France (72,5°/°des importations viennent de l’UE et 75°/° des exportations partent vers l’UE et la France°.

Les supporteurs du régime de Ben Ali ont été, pendant toutes ces années, des syndicalistes bureaucrates.

Cette croissance va main dans la main avec le manque complet de liberté, la persécution des progressistes et de toute autre voix de contradiction, la pauvreté, le taux élevé du chômage, l’injustice sociale et les prix élevés des produits de première nécessité. 55°/° de la population a moins de 25 ans, mais le chômage des jeunes atteint 30°/°.Un jeune sur deux est sans emploi, bien que la plupart d’entre eux soient étudiants du troisième cycle ou ont le niveau de la maîtrise.

 

L’exemple de la Tunisie prouve que la croissance et la compétitivité ne va pas de soi, elles se font contre le progrès et le bien-être de la couche laborieuse et populaire, elles se font contre les droits sociaux et du travail. Les Etats Unis et l’UE portent une très grande responsabilité dans la réalité à laquelle le peuple tunisien a à faire face.

 

Pendant 24 ans le peuple tunisien a vécu dans une grande peur d’arrestations arbitraires, d’emprisonnement, de torture et de différentes sortes d’abus. Jusqu’ici les Tunisiens se sont débarrassés du dictateur, ils auront encore à souffrir d’une autre dictature, plus forte et plus agressive celle des grands capitalistes, des multinationales et du pouvoir des institutions financières internationales spécialement la Banque Mondiale, le FMI et la Banque Européenne d’Investissement.

 

L’immolation par le feu du jeune homme a été la cause de la colère du peuple qui a grandi en sourdine pendant beaucoup d’années. Cette lutte est claire, pleine de promesses et d’espoir, elle prouve jusqu’à maintenant, qu’elle ne s’arrête pas en face des«manoeuvres» et des actions qui ont seulement pour but d’apaiser la colère du peuple sans apporter un réel changement de leur réalité, la lutte n’accepte pas «la démocratie des monopoles», le restant des membres de l’ancien gouvernement dans le gouvernement.

Malgré les balles de la police et les nombreux morts et blessés, la détermination des manifestants n’a pas faibli.

 

Cette lutte ne sera pas satisfaite avec rien de plus que la pleine satisfaction des revendications du peuple pour «la Dignité, le Pain et la Liberté», ils demandent de vraies solutions.

La Fédération Syndicale Mondiale est au côté du peuple tunisien qui lutte, demande la satisfaction de leurs demandes, la libération immédiate de tous ceux qui se sont fait arrêter, l’arrêt de la violence de l’état.

La FSM appelle ses organisations membres et amies à exprimer leur solidarité avec le peuple tunisien et ses luttes pour un travail décent, la liberté et les droits sociaux et syndicaux.

 

L’appel et le slogan du 16ème Congrès pour une lutte«contre la brutalité capitaliste, pour une justice sociale et un monde sans exploitation» qui embrasse un mouvement syndical de classe dont nous avons besoin aujourd’hui.

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5 février 2011 6 05 /02 /février /2011 23:55

Le Grand Soir


« L’Iran voudrait se doter de l’arme nucléaire. Et nous devons tout faire pour l’en empêcher. »


Effectivement, la majorité des médias et gouvernements occidentaux nous pousse à craindre cette menace qui ne ferait aucun doute. Ils sont très sûrs d’eux, péremptoires, catégoriques.


Pourtant, ces médias et gouvernements, toujours les mêmes, au Royaume Uni, et aux Etats-Unis en tête, nous ont déjà menti, de façon flagrante, ou ont substitué la propagande à l’information [1-2].


Par rapport au passé, la France a rejoint le groupe des gouvernements soumis au complexe militaro-industriel et au système financier anglo-saxons [3].


Ce complexe militaro-industriel et ce système financier veulent conquérir des marchés, détourner pour eux-mêmes des ressources énergétiques, dominer des populations, y compris les leurs, et surtout, justifier leur existence et préserver leur place, tout en haut de la chaîne alimentaire mondiale.


Dans la version psychologique de cette guerre contre la vérité, composante très importante de la guerre mondiale lancée par le tandem Bush-Cheney en septembre 2001, l’Iran est devenu une cible de choix, et subit des attaques de tous côtés.


Pour envahir la Yougoslavie, la faire éclater, et la soumettre au diktat occidental : diabolisation de la Serbie et de Slobodan Milosevic. Pour envahir l’Afghanistan, en faire une colonie anglo-saxonne et pouvoir voler ses précieuses ressources : diabolisation des Talibans, pourtant récemment connus comme très bons amis de l’administration US, jusqu’en août 2001.


Pour envahir l’Irak : diabolisation de Saddam Hussein, lui aussi un très bon ami des néoconservateurs US.


Pour ces deux derniers exemples, la créature mythique Ben Laden, sorte de Kraken moderne, et son club, Al-Qaida, sortis opportunément de leur boîte par l’Empire anglo-saxon, ont servi de mèche d’allumage… Maintenant, l’Iran.


Le gouvernement iranien aurait truqué le résultat des élections de juin 2009 [4].


Le président sortant, Mahmoud Ahmadinejad, aurait volé la victoire à son opposant, le favori des Occidentaux, Hossein Mousavi. Pour l’électeur occidental, tellement mieux loti, lui qui a la chance d’avoir des présidents comme Barack Obama, Nicolas Sarkozy ou des Premiers Ministres sincères, dévoués, et désintéressés, il est tout bonnement impensable de choisir le « terrible dictateur religieux antisémite » Mahmoud Ahmadinejad ! Comment est-ce possible ? Seul un bidouillage de l’élection peut l’expliquer.


Pourtant, de ce que nous savons grâce au travail de véritables journalistes et auteurs non inféodés aux puissances occidentales dominantes, il semble bien que la majorité du peuple iranien, 24,5 millions de voix (63,3% des suffrages), ait effectivement choisi de reconduire Ahmadinejad à leur tête [5].


Bien sûr, si cela est incompréhensible pour les Occidentaux, c’est tout à fait logique pour un grand nombre d’Iraniens.


Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, le système iranien d’accès aux soins de santé a permis de réduire de 70% la mortalité infantile dans ce pays, l’Iran islamiste, en 30 ans [6]. Contrairement aux Etats-Unis où malgré les dizaines de millions de dollars injectés par le gouvernement fédéral, les soins médicaux primaires dans beaucoup de régions sinistrées et pauvres sont restés très peu performants, avec une mortalité infantile énorme dans certaines régions (comme le delta du Mississipi) et où l’espérance de vie reste trop faible pour un pays soi-disant si évolué.


C’est au point que des pédiatres étatsuniens s’intéressent au système des maisons de santé iranien et voudraient l’importer dans les régions du Sud des Etats-Unis, les plus frappées par la misère et les maladies [7].


De cela, les médias et gouvernements occidentaux, acharnés à répandre le bobard de l’élection truquée en Iran, ne nous disent rien.


Ahmadinejad est beaucoup plus proche, dans son programme électoral, des millions d’Iraniens habitant dans les provinces, dans les villes, petites et moyennes, et dans les villages, que Mousavi, le champion des classes moyennes et aisées minoritaires et qui voudraient imposer à tout le pays le système à l’occidentale, le meilleur (pour elles) et cela ne se discute pas [8].

L’ouragan d’austérité qui se prépare à fondre sur l’Europe, pulvérisant tous les garde-fous sociaux durement acquis et terrassant les plus faibles, les plus démunis, témoigne du contraire.

« Un sondage d’opinion publique effectué à l’échelle de tout l’Iran et de manière scientifiquement rigoureuse par deux experts états-uniens, trois semaines seulement avant le vote, […] montrait qu’Ahmadinejad avait une avance telle qu’il pouvait remporter plus du double des voix de son adversaire, c’est-à-dire une marge encore plus importante que celle de sa victoire électorale, le 12 juin.

Ce sondage montrait que chez les électeurs d’origine azérie [l’ethnie de Mousavi], Ahmadinejad bénéficiait de deux fois plus de voix que Mousavi, ce qui démontrait à quel point les intérêts de classe incarnés par un candidat sont capables d’occulter l’identité ethnique de l’autre » [9]

Mahmoud Ahmadinejad est le président légitime de la République d’Iran. C’est lui que la majorité des Iraniens a choisi. Pas tous les Iraniens, mais la majorité. Les électeurs de Ségolène Royal, en France, en 2007, ont-ils violemment manifesté dans la rue, par millions, quand le résultat du scrutin fut connu ? Par Twitter, Facebook et des millions de sms, ont-ils alerté le monde entier du vol de leurs élections, chose forcément évidente puisque leur candidat n’avait pas gagné ?


Pour ceux qui diraient qu’un trucage électoral ne risque jamais d’arriver en Occident, le paradis des cures d’austérité, des patrons et des ministres intègres, le film « Hacking Democracy » [10] (« La Démocratie Piratée ») nous démontre toutes les zones d’ombre qui entachent les élections US de 2000, celles qui ont mené au pouvoir Georges W. Bush. En France, lors de la dernière élection présidentielle de 2007, près de 1,7 millions de Français ont voté à l’aide de machines électroniques [11], des machines à frauder selon l’association à but non-lucratif BlackBoxVoting.org.


Les médias français et anglo-saxons nous dépeignent un Iran totalitaire et répressif. Les manifestations des partisans de Mousavi auraient été réprimées dans le sang. Les minorités juives seraient durement opprimées. Ahmadinejad nierait l’holocauste et voudrait détruire Israel. Les femmes sont traitées de façon inhumaine et les condamnés à mort le sont par les moyens les plus barbares comme la lapidation.


L’enjeu n’est pas de faire de l’Iran un pays champion des droits de l’homme, d’ignorer la souffrance d’un certain nombre de femmes iraniennes, de nier que des mises à mort inhumaines y sont pratiquées…


Ceci dit, connaissez-vous une mise à mort…humaine ?

 

http://medias.lepost.fr/ill/2009/03/08/h-20-1450042-1236546224.jpg

Exécution aux USA photo: Le Post


Le concept de « balle à blanc » [12], pratiqué aux Etats-Unis, rend-il la mort plus « humaine » à nos yeux ?


L’enjeu est de rétablir le gris et toutes ses nuances, là où les médias ne voudraient nous montrer que du « blanc » (le système à l’occidentale), ou que du « noir » (le système iranien d’Ahmadinejad à renverser absolument).


Les pays défenseurs du système à l’occidentale, ou présentés comme « blancs », irréprochables parles médias, n’ont aucune leçon à recevoir de l’Iran en matière de répression violente de manifestations de populations civiles, même pacifiques. Ainsi les Israéliens sont coutumiers de répression dans le sang de Palestiniens osant défier, même pacifiquement, leurs oppresseurs [13].


Un Palestinien, sa vie, sa dignité, valent-elles moins que celles d’un Tibétain ou celle d’un Juif ?

La réponse à cette question est fondamentale car si c’était le cas, les gouvernements et les philosophes occidentaux ne sont alors vraiment pas les preux chevaliers qui voudraient sauver les femmes iraniennes, ou les condamnés à mort de la lapidation, mais seulement des démagogues hypocrites pour qui la vie de certains humains, dans un certain contexte, est plus importante que celle d’autres humains.


A chaque réunion du G20, les manifestations sont réprimées en Occident avec une violence inouïe, sans distinguer hommes, femmes, enfants ou vieillards, par des forces de l’ordre de plus en plus équipées.


Les policiers sont désormais encadrés par des paramilitaires, équipés de Hummers avec canons à ultra-sons et toutes sortes d’armes sophistiquées, non létales mais pouvant infliger de terribles souffrances [14].


Si la Birmanie [15] et l’Arabie Saoudite ne menacent pas ouvertement Israel et ne veulent pas devenir nucléaires, ce sont des dictatures de type militaire, intolérantes à toute forme d’opposition, écrasant toute manifestation, traitant la femme comme un objet et mettant à mort leurs condamnés (parfois pour des broutilles) de la façon la plus barbare qui soit, par exemple en les décapitant avant de les crucifier, comme en témoigne certains rapports d’Amnesty International : « En Arabie saoudite, les peines de mort sont invariablement prononcées et appliquées à l’issue de procès iniques et secrets. » [16].

 

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Décapitation en Arabie Saoudite, pays ami de la France photo: http://www.bivouac-id.com


Pour terminer, la dernière propagande en date lancée à propos de l’Iran, par le « défenseur des opprimés », sauf ceux de Guantanamo, le « philosophe » Bernard-Henry Levy [17], serait la condamnation à mort par lapidation de Sakineh Mohammadi-Ashtiani, pour adultère [18].


Cela fait penser à l’histoire des couveuses du Koweït, renversées sans ménagements, selon les médias de l’époque, par les soldats irakiens de Saddam, avant la première guerre du Golfe, en 1991, une véritable intoxication médiatique qui avait néanmoins réussi à emporter l’adhésion des peuples occidentaux à une effroyable guerre asymétrique de plus [19].


Cela fait aussi penser aux charniers de Timisoara [20], aux armes de destruction massives bactériologiques de Saddam Hussein, à tous les mensonges sur le 11 septembre 2001, à toutes les morts soi-disant causées par la grippe H1N1 lorsque les médias furent pris de fièvre hystérique en 2009, pour le plus grand bonheur des multinationales pharmaceutiques.


Comme pour le bobard de l’élection truquée, il semble qu’on ne nous dise pas tout. Toujours grâce au travail de véritables journalistes et d’auteurs non inféodés aux puissances occidentales dominantes, nous savons que Sakineh ne sera pas lapidée [21] et que sa condamnation à mort n’est pas pour adultère, mais pour meurtre [22]. Cela ne justifie pas de mettre à mort cette dame.


Rien ne justifie, nulle part, la mise à mort d’un être humain, hormis la légitime défense peut-être.

Le débat devrait donc se situer à ce niveau : êtes-vous pour ou contre la peine de mort ? Dans ce cas, nous pouvons nous intéresser à la Birmanie, à l’Arabie Saoudite, aux Etats-Unis, dont le système juridique inique et cynique est reconnu par certains acteurs de ce système lui-même, comme étant l’un des plus injustes au monde [23].


Dans ce cas, nous pouvons nous opposer, ainsi que tous les gouvernements occidentaux, Nicolas Sarkozy, Bernard-Henry Levy, à la condamnation à mort aux Etats-Unis de Teresa Lewis, une autre pauvre femme, déficiente mentale, dont la vie sera bientôt effacée de la surface de la Terre, dans l’indifférence générale… (Cette mise à mort a eu lieu, ce 23 septembre 2010)[24].

Finalement, peu importe, si, grâce à ce tapage, une vie, en Iran, peut-être sauvée. En fait, cela importe.


Ce n’est pas un point de détail, un hasard sans conséquences, si cette empathie soudaine des médias occidentaux pour une femme, une meurtrière, concerne l’Iran. Cette femme-là, cette condamnation-là, dans ce pays-là. A ce moment-là. Il n’y a rien de fortuit.


Rien de sincère. Vos émotions en sont l’enjeu.


Si aucun référendum populaire ne précédera la mise à feu des missiles vers l’Iran, cela paraît clair, il ne faut toutefois pas sous-estimer la réaction des populations, une fois l’ampleur des pertes civiles connues, bien que les médias, CNN, BBC, TF1, fassent tout pour en camoufler la portée. Comptez sur les journalistes « intègres » qui nous désinforment à longueur de journée, pour cela.


C’est le mouvement anti-guerre, aux Etats-Unis, qui a fait cesser la geurre au Vietnam et a fait reculer Nixon [25].


Ce n’est pas le manque de balles ou d’idées dans l’esprit des stratèges US. La réaction populaire occidentale, sa force, sa vitesse d’apparition, dans le cas d’une guerre finalement déclarée contre l’Iran, seront conditionnées par l’image que tous auront de l’Iran d’Ahmadinejad à ce moment.


Ahmadinejad et son gouvernement, démocratiquement élus, ne veulent pas détruire tous les juifs et effacer Israel de la surface de la Terre.


Par contre ils veulent, comme une majorité d’Iraniens qui ont voté pour eux, faire cesser les guerres impériales menées par les Etats-Unis et Israel, dans la région.


Ils veulent que le génocide pratiqué à l’égard des Palestiniens, leur déportation, leur emprisonnement dans d’énormes enclos à ciel ouvert, sans infrastructures civiles que n’importe quel état mérite, cesse !


Le principal obstacle entre ce souhait et la réalité, c’est Israel. Ce n’est pas le Hamas. Ce n’est pas Ben Laden. Ce n’est pas Ahmadinejad.


Le dernier massacre, celui de Gaza, à coup de plomb durci et d’uranium appauvri, a ravivé la tension entre les deux pays, et l’a mené à son paroxysme.


Dans la région, l’Iran et ce gouvernement-là sont les défenseurs les moins hypocrites et les plus intransigeants des Palestiniens de Cisjordanie et de Gaza qui subissent, parce qu’ils sont dans le chemin des visées hégémoniques d’Israel, et non à cause de leurs roquettes artisanales, un véritable enfer.


Par ailleurs, plus de vingt-mille juifs vivent en Iran, sans subir la moindre humiliation de la part du régime dominant [26], même si, comme partout, en Iran moins que dans certains endroits du monde, des extrémistes se déchaînent parfois sur eux verbalement. Ces extrémistes, comme les médias en France ou aux Etats-Unis voudraient pourtant nous le faire croire, ne sont pas le régime au pouvoir.


Sur ce plan, si l’empathie occidentale pour Sakineh était vraiment sincère et non un coup de poker politique, les leaders européens et nord-américains devraient se joindre à l’Iran et faire cesser l’intolérable calvaire palestinien.


Un Iran nucléaire ne serait-il pas le meilleur antidote à la folie d’Israel (du gouvernement israélien actuel au pouvoir), une folie aujourd’hui insensible à tous les appels à la raison.


Israel est le véritable état religieux extrémiste de la région qui utilise des prétextes religieux pour justifier ses actes, son armement nucléaire clandestin et son attitude inhumaine vis-à-vis de minorités.


Ce n’est pas l’Iran.


Quant à ce désir d’armes nucléaires dont on accuse l’Iran, refusant de les croire quand ils disent vouloir disposer d’installations à visée civile [27], comme pour les armes de destruction massive irakiennes en son temps, ce projet militaire n’est pas prouvé aujourd’hui, ni par Israel, ni par les Etats-Unis, ni par l’AIEA, l’Agence Internationale de l’Energie Atomique.


Déjà en 1998, à l’époque, les inspecteurs des Nations Unies pour le désarmement en Irak avaient eu beau nier l’existence de cet arsenal fantasmé par les anglo-saxons, rien n’y a fait. La guerre était programmée de toute façon [28].


Petit voyage au paradis, les armes de destructions massives de l’Occident


Quittons l’Iran et visitons le fabuleux Occident, donneur de leçons et gardien de la morale mondiale.


La cure d’austérité préconisée par le FMI


Le Fonds Monétaire International, pas plus que la Banque Mondiale, n’ont rien d’International, ni de Mondiale.


Menés aujourd’hui par le « socialiste » Dominique Strauss-Kahn et par Robert Zoellick, deux « philanthropes » accomplis, le FMI et la Banque Mondiale sont toutes deux des organisations sous contrôle des Etats-Unis, et des Occidentaux [29].

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Appelons un chat un chat. Ce sont le Fonds Monétaire Occidental et la Banque d’Occident. Tels sont les termes corrects, que tous les journaux honnêtes devraient utiliser. Ces organismes appliquent des mesures injustes et malhonnêtes à tout le monde (en ce sens, ils sont international, mondial) mais travaillent pour les riches, les 400 milliardaires étatsuniens et du reste du monde, un club transnational plus puissant que les gouvernements [30].

 

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Louisiane


Pour que le monde comporte 400 supers milliardaires, comprenez-vous qu’il faut absolument des milliards de pauvres, et même très pauvres sur la Terre ?


Le FMI est un des nombreux moyens d’y arriver.

 

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Une fillette en Haiti réapprend à marcher photo: healthkut.com/blog


Après s’être occupé de nombreux pays, dont la Grèce récemment, il s’est jeté, tel un vautour affamé, sur le Pakistan déjà durement touché par des inondations [31].


Toute l’Europe se trouve à présent dans son collimateur.


Les médias occidentaux utilisent , pudiquement, le terme de « réformer » [32]. Entendez par là « baisser les prestations sociales, privatiser les services publics, démanteler le droit du travail. »

‘Réformer’ est en fait ‘piller’, ‘saigner’, ‘dévaliser’.

« Depuis la fin des accords de Bretton Woods, cette institution [le FMI] pilotée par les Etats-Unis (majoritaires en voix) a systématiquement prôné la privatisation et la suppression des politiques sociales (fin des remboursements des frais de santé, fin des services publics etc.). Il n’a jamais présenté un éventail de remèdes disponibles à chaque pays selon sa situation propre…

Les populations sont toujours ressorties appauvries de ces cures d’austérité, et cela a parfois été jusqu’à les priver de ressources vitales.


Ainsi au Ghana au début des années 2000, la privatisation de la compagnie nationale de distribution de l’eau, suite à un ajustement structurel, a contraint de nombreux villageois à devoir choisir entre boire de l’eau potable et manger.


L’entreprise nouvellement en charge de la distribution avait doublé les prix, voire triplé ou quadruplé selon les villes.


Systématiquement, l’élite locale s’est enrichie tandis que le peuple s’est appauvri. Cette politique est criminelle lorsqu’elle prive des citoyens de soins, d’eau potable, de nourriture, ou d’éducation. »


Le transfert de richesses s’opère des pauvres vers les riches.


L’argent prêté par le FMI doit être utilisé suivant les conditions fixées par l’organisme ‘international’ : constructions de centrales électriques, de routes, de barrages », par des entreprises occidentales, états-uniennes [33].

 

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Pauvreté en Angleterre Photo: http://www.dailymail.co.uk/news/article-412044/A-quarter-British-children-living-poverty.html

La guerre économique et la corruption des élites nationales suffisent souvent à l’empire anglo-saxon, qui sert les intérêts du complexe militaro-industriel et du système financier occidental, pour arriver à ses fins.


Si le FMI et les « assassins économiques » échouent, alors vient le temps des bombes et des assassinats, après une habile manipulation de l’opinion des masses populaires.

« Ce que l’on nomme ‘mondialisation’, à ce titre, n’est pas autre chose que l’expansion de l’Empire, le FMI étant une arme parmi d’autres ».

Les plans moralisateurs et culpabilisants du FMI, les discours des « experts » chargés de lui préparer le terrain, ne doivent pas faire oublier que c’est la recherche effrénée de profits, sans limites, avec la complicité de certains ministres, qui a mené des banques à la banqueroute, et qu’au lieu de sanctionner les irresponsables, juger les escrocs, responsabiliser les institutions fautives et les impliquer durement dans leur remise à niveau, c’est par un transfert de richesses publiques, appartenant à toute la population, que le sauvetage des banques et des gros actionnaires a eu lieu.


Le FMI, toujours aidé par les complices du premier vol, restés en place, parfois récompensés et promus, voudrait nous piller une deuxième fois.

« Par ailleurs, alors que le Fonds impose des gels -voire des baisses- de salaire un peu partout, celui de son directeur général, le socialiste français Dominique Strauss-Kahn, a connu une hausse supérieure à 7% lors de son arrivée, pour se stabiliser à un demi-million de dollars par an. » [34].

Saviez-vous qu’en Ukraine, parce que le gouvernement de Viktor Iouchtchenko avait voulu augmenter de 20% le salaire minimum misérable de sa population, fin octobre 2009, le FMI avait de suite suspendu son programme de « sauvetage » ?


La Roumanie, l’Islande sont des exemples flagrants, récents, de prédation du FMI.


Pour obtenir l’argent du FMI, que celui-ci possède déjà par transfert des richesses des pays pauvres vers les pays riches, il faut augmenter ses impôts, tailler dans les dépenses publiques, diminuer les salaires des fonctionnaires et fermer des dizaines d’écoles et d’hôpitaux [35].


Le FMI est bien le meilleur ami des 400 milliardaires du monde entier et un des pires prédateurs de l’humanité.


Corexit et globules rouges, BP, une multinationale qui vous respecte


BP, tristement célèbre avec la catastrophe pétrolière dans le Golfe du Mexique, est le symbole de toutes ces multinationales qui détruisent le monde avec arrogance, BP, et ses partenaires, Halliburton, Anadarko, Transocean [36].


BP est le symbole de ces multinationales plus puissantes que les gouvernements, dictant leur conduite à des institutions fédérales normalement au service des populations, payées par leurs impôts, faisant de l’administration Obama, de la NOAA (National Oceanic and Atmospheric Administration), de l’EPA (Environmental Protection Agency), de la Garde Côtière US, des pantins dans les mains de BP.


Le Corexit est un dispersant de surface pour marées noires.

 

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Le Corexit 9500 décompose le pétrole brut en petites boulettes d’hydrocarbure et une bouillie de pétrole aqueux qui s’infiltre sous les barrages mis en place pour protéger les nurseries de poissons, les parcs à huîtres…Le propylène glycol, un composant majeur du Corexit 9500, est mesuré dans les eaux du Golfe à 150 fois la concentration létale [37].


Le Corexit est un pesticide neurotoxique, interdit dans d’autres pays.


BP est impliqué avec la société qui fabrique le Corexit [38] utilisé sous sa version interdite en Angleterre notamment, du moins près du littoral.


La doctoresse en toxicologie Susan Shaw, fondatrice et directrice de l’Institut de recherche environnementale marine dans le Golfe du Mexique a étudié les effets du produit utilisé par BP [39].


Le Corexit fait éclater les globules rouges, entraîne des hémorragies internes et des lésions hépatiques et rénales, dont souffrent des milliers de Louisianais aujourd’hui. C’est en se combinant au pétrole que le Corexit atteint sa toxicité maximale, passant directement à travers la peau.


Les solvants du dispersant font rentrer le pétrole à travers la peau et le font pénétrer dans les cellules, les organes.


Le docteur en biologie et toxicologie marine Chris Pincetich affirme que le Corexit disloque les membranes cellulaires [40].


Selon tous ces spécialistes, le remède utilisé est plus toxique que le problème à résoudre.


L’EPA, quant à elle, a basé ses conclusions sur la toxicité du Corexit de BP en étudiant les effets sur les poissons après seulement 96 heures d’exposition. Comme les poissons ne sont morts, tous, qu’après deux semaines, elle a conclu à l’innocuité du produit [41] !


Chez BP, comme chez toutes ses consœurs, le profit passe avant tout.


Comme le décrivait le Washington Post, sur base de documents internes provenant du pétrolier, BP « a bafoué la sécurité en négligeant l’équipement âgé, a fait pression sur ses employés afin qu’ils ne signalent pas les problèmes et a écourté voire retardé les inspections afin de réduire les coûts de production. » [42]

« Selon l’agence de santé de l’Etat de Louisiane, les ouvriers de BP deviennent de plus en plus malades après avoir respiré les vapeurs produites par les ‘dispersants’ toxiques et par le pétrole. Les émissions des deux produits combinés étant encore plus dangereuses pour la santé. En conséquence, BP a ordonné à ses employés de ne pas se présenter aux centres médicaux de l’Etat, mais à ceux de l’entreprise. Dans le même temps, la direction de BP interdisait à ces mêmes salariés, sous peine de devoir prendre la porte, de porter des appareils respiratoires pour se protéger des émanations, avec toujours le même souci, celui de l’image. »

« La plupart de ces ouvriers de nettoyage…ne peuvent pas non plus compter sur le soutien d’Obama. En dépit d’une pétition qui a recueilli les signatures de centaines d’associations et de dizaines d’hommes politiques, la Maison Blanche a refusé d’exiger de BP que ses ouvriers soient munis de respirateurs. » [43].

Quand l’EPA a essayé d’interdire à BP l’utilisation du Corexit, l’agence s’est fait remonter les bretelles et a dû baisser d’un ton et de toute façon, malgré ses recommandations revues à la baisse, les gardes-côtes fédéraux ont accordé à BP pas moins de 44 dérogations. [44]


Parce que le produit est fabriqué par une entreprise de laquelle BP est proche, la multinationale préfère l’utiliser, alors que d’autres dispersants seraient beaucoup moins toxiques et dans certains cas deux fois plus efficaces [45].


BP a fait utiliser des dispersants toxiques pour diminuer la masse visible de pétrole afin de diminuer les amendes dont la compagnie fait l’objet, et utilisé le Corexit en particulier, le plus toxique de tous, et un des moins efficaces, parce qu’il était produit par un de ses firmes associées.


Alors qui dirige vraiment les Etats-Unis ? Obama ? Ou BP ?


L’impact de cette catastrophe provoquée par les négligences d’une firme privée sans foi ni lois ne se limitera pas au Golfe du Mexique mais s’étendra au monde entier.

Ainsi,

« L’ensemble de la ‘rivière d’eau chaude’ qui s’étend des Caraïbes jusque sur les bords de l’Europe de l’Ouest se meurt à cause du Corexit que l’Administration Obama a permis à BP d’utiliser pour cacher l’ampleur de la catastrophe pétrolière du Deepwater Horizon de BP.

Les quelque deux millions de gallons du Corexit, ainsi que plusieurs millions de gallons d’autres dispersants, ont fait que la majeure partie des deux cents millions de gallons de pétrole brut, qui ont jailli depuis des mois de la tête du puits BP et des autres sites avoisinants, de surtout couler au fond de l’océan.


Cela a contribué à dissimuler une grande partie du pétrole, avec l’espoir que BP pourrait sérieusement réduire les amendes fédérales du désastre pétrolier.


Cependant, il n’existe actuellement aucune façon efficace de nettoyer le fond du Golfe du Mexique, dont environ la moitié est couverte de pétrole brut.


En outre, le pétrole s’est écoulé le long de la Côte Est de l’Amérique et jusque dans l’Atlantique Nord, et il n’y a aucun moyen de nettoyer efficacement ce pétrole des fonds marins.


Cette énorme quantité de pétrole brut recouvrant une zone aussi immense a sérieusement affecté les systèmes actuels du courant Loop, du Gulf Stream et de l’Atlantique Nord, en brisant les limites des couches du jet d’eau chaude. » [46]

Tout ce système est un des principaux processus de thermorégulation mondiale qui régularise les températures de la planète.

« Nous pourrions être en train d’entrer dans une toute nouvelle ère glaciaire complète…

L’utilisation du Corexit et des autres dispersants par BP, avec la pleine coopération de l’Administration Obama, a créé le danger le plus important dans toute l’histoire de cette planète. C’est ce qui arrive quand une grande nation glisse pour devenir un type de nation du Tiers-Monde, où l’argent seul est la force motrice essentielle dans toutes les actions du gouvernement. » [47].

Radiations, le cadeau de l’Empire occidental au monde entier

Pour terminer ce panorama non exhaustif de l’Occident et de ses ADM, parlons de l’uranium appauvri, le cadeau des armées occidentales au monde entier.


L’uranium appauvri permet d’augmenter la puissance de perforation des obus contre des cibles blindées ou des bâtiments.

 

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Bébé irakien victime de l'uranium appauvri


Soyons certains que l’Iran aura sa ration d’uranium appauvri, si la « diplomatie » échoue.


Depuis le déferlement « libérateur » des hélicoptères et des tanks anglo-saxons, après la pluie de bombes offertes par les multinationales étatsuniennes de la même famille que BP, les habitants de Fallujah, une entité de 300 000 habitants de l’Irak dévasté, ont 4,22 fois plus de risques de développer un cancer que les Egyptiens ou les Jordaniens. Cette « probabilité est 12,6 fois plus grande chez les enfants de moins de 14 ans. Le risque de leucémie chez les personnes de 0 à 34 ans est 38,5 fois plus élevé. La mortalité infantile atteint des taux record : 80/1000, soit 4 fois les taux égyptien et jordanien. À partir de 2009, ce taux passe même à 136/1000 !! Le « sexe ratio » (le taux comparé d’hommes et de femmes au sein d’une population) est totalement anormal dans la tranche des 0-4 ans vivant à Fallujah où l’on enregistre un déficit de naissances de garçons de 18% ! D’une manière générale, le nombre de naissances a chuté, sans que l’on sache encore si cela est dû à une baisse de la fertilité ou à un nombre plus élevé de fausses couches... Ou aux deux. »

« Les radiations provoquent en effet des changements au niveau de l’ADN dont les effets se font en général sentir sur les descendants. C’est ainsi que des malformations génétiques sont observées sur les enfants des enfants des survivants d’Hiroshima. » [48]

À Fallujah, l’Iran doit sembler bien moins menaçant, même nucléaire, que l’Empire du Bien commandé par les 400 milliardaires de la planète.


Iran ou Occident ?

 

http://www.teeth.com.pk/blog/wp-content/uploads/image/fallujah_phosph.jpg

Massacre à Fallujah à l'aide d'armes des destruction massive (à l'uranium appauvri, au phosphore, napalm...)


De qui avez-vous le plus peur aujourd’hui ?


Des armes de destruction massives de l’Occident, bien réelles, que l’Empire anglo-saxon utilise tous les jours devant vos yeux, certaines sur les habitants de pays lointains, d’autres sur leurs propres populations ?


Du FMI, du Corexit, de l’uranium appauvri ?


De BP, d’Halliburton, de Monsanto, d’Exxon, les véritables gouvernements de l’Occident, semeurs de guerres et de produits toxiques ?


Ou d’Ahmadinejad ?


Pascal Sacré

 

http://www.lewrockwell.com/rockwell/fallujah.jpg

La ville de Falloujah dévastée par les agresseurs


Sources :

[1] http://www.liberation.fr/monde/0101...

[2] http://www.liberation.fr/monde/0101...

[3] http://www.contreinfo.info/article....

[4] Iran : le bobard de l’ « élection volée », http://www.mondialisation.ca/index....

[5] Op.cit.

[6] http://www.mondialisation.ca/index....

[7] Op.cit.

[8] Iran : le bobard de l’ « élection volée », op.cit.

[9] Op.cit.

[10] http://www.reopen911.info/video/hac...

[11] http://www.dailymotion.com/video/x1...

[12] http://www.legrandsoir.info/La-ball...

[13] Répression israélienne sauvage contre les manifestations palestiniennes pacifiques : http://ism-france.org/news/article....

[14] http://www.dailymotion.com/video/xa...

[15] Birmanie : répression contre les opposants, Rangoun est le théâtre de violents affrontements : http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3216,36-959911,0.html

[16] En Arabie saoudite un condamné a été décapité et crucifié : http://www.amnesty.org/fr/news-and-...

[17] Pour masquer les activités secrètes des médecins de Guantánamo, la Navy a organisé des voyages de presse à l’attention de journalistes complaisants. Ainsi, l’essayiste français Bernard Henry Lévy a-t-il volontiers joué le témoin de moralité en visitant ce qu’on a bien voulu lui montrer. Dans son livre American Vertigo, il assure que cette prison ne diffère pas des autres pénitenciers états-uniens et que les témoignages de sévices qu’on y pratiquerait « ont été plutôt gonflés » (sic) [American vertigo, par Bernard-Henry Lévy, Grasset & Fasquelle 2006.]

Le secret de Guantánamo : http://www.voltairenet.org/article1...

[18] Le scandale Sakineh : http://www.voltairenet.org/article1...

[19] 17 janvier 1991, Opération Tempête du désert, Piège et désinformation, paragraphe 5 : http://www.herodote.net/histoire/ev...

[20] Le charnier de 1989, une falsification célèbre.

Article détaillé : Affaire des charniers de Timişoara.

On rapporta qu’il y aurait eu 1 104 tués et 3 352 blessés pendant l’insurrection contre le chiffre réel de 93 morts à la fin. Les images de cadavres dont l’origine véritable avait été cachée furent abondamment diffusées dans le monde entier. Ce n’est qu’en février 1990 qu’il fut officiellement enfin établi qu’il s’agissait là d’une intoxication. Le nom de Timişoara est dès lors resté associé aux manipulations dont les médias sont toujours susceptibles d’être à la fois les dupes et les relais3. Surtout les relais, car dès la première diffusion des images au public de télévision il était parfaitement visible, pour un observateur un tant soit peu attentif et les journalistes se devraient de l’être professionnellement, que les corps déterrés portaient de nombreuses cicatrices, qui plus est de plaies soigneusement recousues trahissant des interventions chirurgicales. http://fr.wikipedia.org/wiki/Timi%C...

[21] Les autorités iraniennes n’ont pas l’intention de lapider Sakineh (communiqué) : http://www.aps.sn/aps.php?page=arti...

[22] Le scandale Sakineh , op.cit.

[23] The Triumph of Evil : http://www.globalresearch.ca/index....

[24] Teresa Lewis risque d’être exécutée dans 48h aux Etats-Unis dans l’indifférence médiatique générale : http://www.futurquantique.org/?p=11560

[25] Richard Nixon, the memoirs of Richard Nixon, New York, Grosset and Dunlap, 1978. “Bien que j’aie publiquement persisté à ignorer la controverse anti-guerre, […] je savais que, après toute cette contestation et après le Moratoire [les manifestations nationales d’octobre 1969], l’opinion publique américaine serait profondément divisée à propos de toute escalade militaire. »

La loi et la justice, Law and Justice, © Howard Zinn, 1990.

[26] Nucléaire iranien, Yves Bonnet, Editions Michel Lafon, 2008, pp. 354-355

[27] Absence de l’élément clé : la preuve, dans les estimations alarmistes sur le programme nucléaire iranien : http://www.mondialisation.ca/index....

[28] Guerre à l’Irak, ce que l’équipe Bush ne dit pas, William River Pitt, entretien avec Scott Ritter, ancien inspecteur des Nations Unies.

[29] Le FMI veut saigner un Pakistan déjà ravagé par les inondations : http://www.wsws.org/francais/News/2...

[30] Bill Gates, Warren Buffett et les 400 milliardaires : http://www.mondialisation.ca/index....

[31] Le FMI veut saigner un Pakistan déjà ravagé par les inondations, op.cit.

[32] Le FMI attaque l’Europe : http://www.internationalnews.fr/art...

[33] Op.cit.

[34] Ouragan d’austérité sur l’Europe : http://www.cadtm.org/spip.php?page=...

[35] Révolte contre l’UE et le FMI : la Grèce, l’Islande et la Lettonie pourraient montrer la voie : http://www.oxygene.re/exportation/p...

[36] The Gulf oil disaster truth, By Wayne Madsen : http://onlinejournal.com/artman/pub...

[37] Op.cit.

[38] Ce que les grands médias ne disent pas sur le nettoyage de la marée noire, Paul Fassa

[39] Le Dr Susan Shaw expose les dangers du Corexit : http://www.youtube.com/watch?v=Oeea...

[40] Le Dr Chris Pincetich donne son point de vue : http://www.youtube.com/watch?v=1Fxf...

[41] Toxicologists : Corexit “Ruptures Red Blood Cells, Causes Internal Bleeding”, "Allows Crude Oil To Penetrate “Into The Cells” and “Every Organ System" http://www.washingtonsblog.com/2010...

[42] BP, entreprise sado-mazout !

http://www.bakchich.info/BP-entrepr...,11435.html

[43] Op.cit.

[44] Exceptions swallow the rule : "Rare cases" turn into daily approvals for dispersant use : http://blogs.edf.org/nanotechnology...

[45] Marée noire : les dispersants utilisés par BP sont-ils toxiques pour l’environnement ? http://www.20minutes.fr/article/405...

[46] Le Gulf Stream et le courant de l’Atlantique Nord à l’agonie : http://pleinsfeux.com/gulf-stream-c...

[47] Op.cit.

[48] L’héritage cancérigène de l’armée américaine en Irak : http://www.bastamag.net/article1165.html

 

Source: http://www.legrandsoir.info

Photo: www.korea-is-one.org

 

http://www.internationalnews.fr/article-les-armes-de-destruction-massive-de-l-occident-un-petit-tour-d-horizon-par-pascal-sacre-57925377.html

 

 

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5 février 2011 6 05 /02 /février /2011 19:52
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La formule de gouvernement proposée aussitôt après la destitution de Ben Ali en Tunisie le 14 janvier, et présidé par Mohammad Ghannouchi, n’est pas le gouvernement de la révolution victorieuse, et de ce fait ne reflète donc pas ses aspirations et n’adopte pas ses revendications. C’est l’expression politique de la bourgeoisie locale et de son maître, la bourgeoisie mondiale, dans une tentative de préserver les bases du système économique et social capitaliste libéral, ce système qui s’est développé sous la protection d’une dictature appuyée, notamment, sur l’appareil du ministère de l’Intérieur et du Parti Constitutionnel Démocratique (RCD)

Plus précisément, nous exigeons la chute d gouvernement de M. Ghannouchi pour les raisons suivantes :

 

Qui est Mohammad Ghannouchi ?

Désigné en 1975 par Bourguiba comme directeur général du Plan, il est apparu le 27 octobre 1987 pour la première fois comme ministre délégué auprès du premier ministre Ben Ali. Puis, suite au coup d’État du 7 novembre, il a été nommé en juillet 1988 par Ben Ali comme ministre du Plan, puis il a occupé plusieurs responsabilités ministérielles participant à l’élaboration et à l’application des politiques capitalistes libérales : en plus du Plan, il a été en charge des finances et l’économie.

 

En 1992, Ben Ali le nomma ministre de la coopération internationale et de l’investissement extérieur, il menait donc les négociations avec les institutions financières internationales (la banque mondiale et le fond monétaire international), concernant la politique économique et sociale du régime de Ben Ali, avant de superviser en sa qualité de premier ministre depuis 1999 son application. Ce qu’il fit avec un grand dévouement, aux dépens des intérêts de la majorité, poussant les cercles capitalistes internationaux à qualifier le pouvoir de Ben Ali de « bon élève ».

 

Il a été nommé premier ministre en novembre 1999, et garda ce poste jusqu’à la destitution de Ben Ali par la révolution et à sa fuite de Tunisie. Ghannouchi est alors resté, chargé d’apaiser la marée populaire révolutionnaire et de l’empêcher de toucher aux bases du système établi.

 

Sur le plan politique, Mohammad Ghannouchi est depuis sa jeunesse membre du R constitutionnel, puis de sa nouvelle formule : le Rassemblement Démocratique Constitutionnel (RCD) au pouvoir dont il devint en 2002 membre du bureau politique, le quartier général politique de la dictature. Il fut ensuite nommé vice-président du rassemblement aux côtés de Hamed Al karaoui, puis ensuite vice-président du Rassemblement (le président étant Ben Ali) le 5 décembre 2008 et jusqu’à la chute du tyran.

 

Mohammad Ghannouchi, est donc un serviteur docile du capital en tant que classe, et cela explique les éloges dont il fait l’objet depuis la chute de Ben Ali. Le maître est donc parti, le serviteur est resté seul, après avoir été habitué à recevoir les ordres et à obéir. Pas surprenant qu’il continue à lui téléphoner en attendant l’arrivée du nouveau maître…

 

Donc, Ghannouchi concentre tout ce que représente le système établi, sur le plan économique, social ou politique : l’exploitation capitaliste sauvage des forces ouvrières locales, l’injustice sociale, le démantèlement du système des services sociaux, l’oppression policière, la répression et l’humiliation du peuple tunisien.

 

 

1- La question démocratique :

- Mohammad Ghannouchi n’a rien à voir avec la révolution. Il est le vice-président du RCD et membre de son bureau politique, ce parti qui a dominé le pays, opprimé, torturé, déplacé et terrorisé tous ceux qui ont eu le courage ou essayé de faire face au despotisme. Ce parti qui a répandu les pots-de-vin et la corruption dans la société et dans tous les rouages de l’État ; les dommages provoqués par le RCD ont touché toutes les composantes de l’état, qu’il a entièrement pris dans ses filets. Puisque ce parti ne peut pas être réformé, il est illogique que nous consentions à aliéner aux symboles du régime révolu le sort de la révolution et les aspirations des travailleurs, des jeunes et du peuple tunisien en général à se libérer du joug de la persécution, surtout lorsqu’il est question de l’un des plus illustres généraux du tyran Ben Ali, qui l’a toujours servi et obéi.

 

- Le proverbe dit : ‘la nature du poisson est de vivre dans l’eau’. Le pouvoir de Ben Ali est toujours là, même après la chute du tyran et sa fuite du pays. La preuve : l’appareil du ministère de l’intérieur, qui a toujours fidèlement gardé la sécurité de Ben Ali et qui maintenant réprime les manifestations pacifiques refusant la tentative de mettre la main sur les acquis pour lesquels le peuple a sacrifié nombre de ses enfants. Le 14 janvier, sur l’ordre de Ben Ali, les forces de la police, supervisées par le premier ministre et ordonnées par le ministre de l’intérieur Frey’a, ont sauvagement dispersé la manifestation populaire pacifique. Puis le 18 janvier, les mêmes forces ont dispersé avec la même sauvagerie la marche pacifique contre le gouvernement de Ghannouchi et de Frey’a, son ministre de l’intérieur. Le droit à la manifestation pacifique est l’un des plus importants droits politiques ; c’est un droit que les masses populaires n’ont jamais pratiqué durant toute la période dominée par Ben Ali et Ghannouchi, sauf dans des cas exceptionnels et de manière extrêmement réduite.

 

- Quant à l’espace de liberté qui commence à surgir ici et là, au début de la récupération de la liberté de la parole, quant au droit de critique et d’expression, ce sont des acquis qui ont été arrachés des tyrans sans leur consentement. Il n’est pas du droit de ceux qui sont encore des ennemis de la liberté et de leurs nouveaux alliés de se cacher derrière ces acquis fragiles afin de justifier le gouvernement illégitime de Ghannouchi. La légitimité aujourd’hui après le déclenchement de la révolution n’est pas celle appuyée sur la constitution ou les lois injustes de Ben Ali, comme le répètent ceux qui tiennent aux restes du régime révolu ; la légitimité s’appuie aujourd’hui sur la révolution, donc sur le peuple. Seul le peuple donne la légitimité à ceux qu’il veut ou la leur retire en manifestant dans les rues, jusqu’à ce que la constitution et les nouvelles lois soient formulées. La nouvelle Tunisie démocratique et sociale à laquelle aspire le peuple sera organisée en fonction de celles-ci.

 

- Ghannouchi a toujours servi et obéi au capitalisme mondial et veillé sur ses intérêts en Tunisie. Ces intérêts sont contraires à l’intérêt national. Il a veillé à faciliter la pénétration de ce capitalisme dans le secteur public, car le comité de privatisation œuvrait sous sa direction directe. C’est lui qui a supervisé la vente des usines de ciment à des sociétés italiennes, portugaises et espagnoles… la liste est encore longue. Le capital mondial, et plus spécifiquement européen, a réussi à s’accaparer des deux tiers de ce qui a été privatisé, bien que cela représente une grande atteinte à la souveraineté du peuple sur ses biens. Ghannouchi a également ouvert le pays au capital mondial, en tant que premier ministre et surtout parce qu’il est le meilleur connaisseur et le plus respectueux des intérêts étrangers en Tunisie. Son gouvernement a conclu plus de 60 accords bilatéraux afin de protéger les investissements en Tunisie, notamment l’accord bilatéral avec la France en 1997. Protéger cet investissement de qui ? Des catastrophes naturelles ? Ou bien peut-être faudrait-il le protéger de Ben Ali et de l’union tunisienne d’industrie et de commerce ? Ou bien du peuple tunisien ? Pourquoi faudrait-il le protéger du peuple tunisien s’il est adapté à ses intérêts ? Ce peuple ne sait-il pas où résident ses intérêts ? C’est un exemple qui montre les répercussions de la politique du gouvernement de Ben Ali / Ghannouchi sur une question extrêmement importante : le droit du peuple tunisien à déterminer son destin de toute liberté sans aucune tutelle, quelle qu’en soit l’origine ou la nature. C’est une question démocratique très importante.

 

- Enfin, c’est bien le gouvernement de Ben Ali, présidé par Ghannouchi, qui appliquait la politique de normalisation avec l’entité sioniste, poussant le gouvernement de l’État d’Israël à regretter profondément la chute de Ben Ali. Cette politique n’a-t-elle pas renié les sentiments de l’écrasante majorité du peuple tunisien, qui refuse l’entité sioniste et soutient les revendications nationales palestiniennes ? Ghannouchi garde-t-il la légitimité qui lui permet de présider le gouvernement de la révolution ? N’est-il pas temps que Ghannouchi cesse de porter atteinte aux intérêts vitaux des tunisiens en général ?

 

 

2- La question sociale :

- Il ne faudrait pas croire in seul instant, comme le gouvernement de Ghannouchi et ses semblables essayent de nous le faire croire, que la question sociale est dissociée dans la réalité de la question démocratique. Les dimensions économique et sociale sont indissociables ; elles représentent les deux bases fondamentales du pouvoir. C’est dans la politique, et précisément à travers l’appareil de l’État, que sont conçues, défendues et patronnées les politiques qui servent les intérêts économiques de la classe dominante dans la société. Donc, la question n’est pas une question morale, comme lorsqu’on dit que « Ghannouchi est un homme propre ou ‘désintéressé’… » En effet, malgré l’importance des qualités personnelles de ceux qui servent l’intérêt général, elles ne sont pas déterminantes dans la sélection du représentant du peuple, de celui qui mérite la confiance de ce dernier afin de veiller sur ses intérêts. Nous savons tous, et je n’ai rien à ajouter à cet égard, que c’est une question de programme. Oui, une question de programme. Lorsque les défendeurs de Ghannouchi, tenant verbalement aux intérêts du peuple et manœuvrant afin de justifier leur partialité pour les intérêts des ennemis de ce dernier, énumèrent ses qualités personnelles, ils omettent de parler de la chose principale qui distingue Ghannouchi des autres symboles du régime révolu, en tant que la personne la plus capable d’appliquer la politique capitaliste libérale et la plus fidèle à cette politique, celle pratiquée depuis 1987 par le régime de Ben Ali qui a profondément affecté les masses populaires tunisiennes, et en premier lieu les travailleurs et les jeunes ; ces derniers ont souffert et patienté ; mais cette patience est arrivée à son terme, et le peuple s’est soulevé tel un volcan contre l’exploitation, la pauvreté, la marginalisation et la faim et pour réclamer son droit aux bases vitales, et en premier lieu le droit au travail. Voici précisément, en plus de la dimension démocratique, le sens essentiel de la grande révolution des masses populaires en Tunisie.

 

- Le gouvernement de Ghannouchi est-il à-même de servir ces intérêts ? Ghannouchi a-t-il mentionné de manière ouverte ou sous-entendu la nécessité d’un changement de politique économique et sociale, celle que le peuple a subi puis refusé de la manière la plus formidable, à travers la révolution ? Ghannouchi n’a-t-il pas affirmé par exemple, lors de l’entretien accordé à France24, que cette mauvaise politique avait connu beaucoup de succès ? Ghannouchi et ses semblables, symboles du régime révolu ou de ceux qui se sont rattachés aux conspirateurs contre la révolution, ne répètent-ils pas les déclarations concernant les acquis et les réalisations ? Pourriez-vous croire un instant qu’ils ont l’intention de renverser le système socio-économique injuste et d’instaurer un système alternatif adapté aux intérêts et aux aspirations des masses populaires ? Leur seule préoccupation n’est-elle pas de ménager le pouvoir chancelant de Ben Ali afin de réussir à s’y maintenir pour continuer à ‘servir l’intérêt du peuple’, comme prétendait avant eux le garantir le tyran chassé ?

 

- Il est clair que le gouvernement de Ghannouchi insiste sur la continuation de la politique socio-économique dictée par les cercles capitalistes mondiaux à travers les institutions financières mondiales. C’est ce que veut dire par exemple la désignation par Ghannouchi du nouveau directeur de la banque centrale Mostafa Kamal Nabili, qui vient de quitter son poste à la banque mondiale en tant que chef de l’équipe des économistes dans la direction du Moyen-Orient et de la région arabe. Ceci ne clarifie-t-il pas assez les intentions du gouvernement et le degré de sa représentation de la volonté du peuple ? Que fera ce gouvernement pour fournir du travail aux centaines de milliers de chômeurs, plus particulièrement les universitaires ? N’est-ce pas la même politique qui a aggravé le chômage ? La lutte contre la corruption financière (si elle est effectuée au cas où le gouvernement de Ghannouchi reste) et ‘l’amélioration du climat d’investissement’ suffiront-ils à fournir le travail ? L’augmentation du rythme de développement économique (si elle se produit) suffira-t-elle pour améliorer la performance du marché de travail ? Assurément non, mille fois non.

 

- Tous les bords politiques doivent annoncer aux masses populaires quel est le programme socio-économique qu’ils considèrent être adéquat pour répondre aux multiples revendications en la matière, et ne pas se contenter de parler du versant démocratique, aussi important qu’il soit : quelle valeur revêtit la liberté pour un chômeur ou un malade incapable de se procurer le coût du traitement ?

 

 

Tunis, 19 janvier 2011
Fathi Chamkhi
RAID-ATTAC/ CADTM TUNISIE

(Traduit de l’arabe par Randa et révisé par Ounsi)

 

P.-S.

Depuis la rédaction de cet article :

- Le gouvernement de Ghannouchi s’est davantage affaibli ; le nombre total des ministres démissionnaires est de 5. Cependant, ce dernier ce maintien ; il est en réunion depuis quelques heures.

- Parallèlement, le mouvement révolutionnaire maintient une forte mobilisation et se concentre sur deux axes, tous deux en rapporte avec le RCD (parti de Ben Ali) :


Toutes les manifestations dans pratiquement toutes les villes de Tunisie, convergent vers les locaux du RCD, même chose pour son siège à Tunis. Certains, notamment à Tataouine, ont été investi et saccagé par les manifestants.


Les employés des entreprises publiques et des administrations centrales de l’Etat, surtout à Tunis (sièges sociaux…) organisent des occupations qui réclament l’exclusion des dirigeants, qui sont en même temps des membres notoires du RCD. Ce fut le cas de la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (PDG et DGA chassés hier), STAR –assurance- (PDG chassé), BNA –banque- (PDG chassé)… Les employés de l’administration centrale des impôts, tout en exigeant la démission immédiate de du directeur, veulent préserver les dossier afin de pouvoir enquêter par la suite sur les évasion fiscales…

 

Source : CADTM

 

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5 février 2011 6 05 /02 /février /2011 19:50

 

Nul ne peut contester le caractère soudain et imprévisible du soulèvement tunisien. Le suicide par immolation du jeune Mohamed Bouazizi a mis le feu à un mouvement qui a pris la forme d’une rébellion transformée en une révolution populaire. Des années d’étouffement et de frustration ont donné à cette mobilisation la force et la puissance nécessaires à renverser le dictateur Ben Ali. Ce dernier, à la surprise générale, a quitté le pays vite, très vite. Etrangement vite.

De plus en plus de sources mettent aujourd’hui en évidence le rôle tout-à-fait central et critique des États-Unis pendant la crise et sa gestion. On savait depuis longtemps que Washington était très engagé en Tunisie (comme d’ailleurs Israël, et de façon continue et plurielle) dans les domaines de la sécurité, de l’information, et des intérêts géostratégiques. Le dictateur Ben Ali a été formé par les services militaire et sécuritaire américains. Sa relation de bonne entente avec l’Europe passait par la France alors même que son système s’appuyait sur le soutien américain et la collaboration israélienne. Tout cela était connu et le silence complice de l’Occident vis-à-vis du régime corrompu et tortionnaire de Ben Ali tenait de la simple protection des intérêts multiples dans la région. Peu importe que celui-ci tuât, torturât ou spoliât son peuple tant que la sécurité et les intérêts régionaux et stratégiques étaient maintenus. Rien de nouveau, au demeurant.
 
Or l’immédiate réaction américaine, face à une rébellion massive que personne n’avait prévue, fut proprement étonnante et à vrai dire intelligente et habile. Le Président Barack Obama a très vite salué le courage du peuple tunisien alors que les nations européennes, au premier rang desquelles la France, restaient interdites et déstabilisées par l’évolution rapide de la situation. C’est que Washington avait un temps d’avance sur tous les autres « gouvernements amis » de la Tunisie. C’est en effet sur le conseil et l’orientation de la Maison Blanche et de son commandement militaire que le Ministre des affaires étrangères et le commandant en chef de l’armée tunisiens ont géré la situation. Après quelques heures de troubles et d’hésitations,j il s’est agi d’aller très vite et deux décisions se sont imposées : exiler le dictateur et faire jouer à l’armée un rôle de médiation et de protection. Le Président Ben Ali est proprement tombé dans un piège : le Ministre des affaires étrangères l’a persuadé de quitter "pour un temps" le pays et de revenir quand les choses auraient été maitrisées. Ben Ali a quitté la Tunisie en pensant qu’il y reviendrait et qu’il se rendait en France (ce qui explique les premières informations lancées sur sa possible destination). Son avion est parti sur Chypre et ce sont les Américains qui ont négocié, avec le Gouvernement saoudien, les termes de l’exil du dictateur : isolement, interdiction de mouvement et d’expression publique, neutralisation absolue.
 
Ainsi l’administration américaine a pris de court la France et l’Europe et s’est assurée des bénéfices politiques et géostratégiques fondamentaux dont l’impact va sans doute s’avérer déterminant pour l’avenir. La rapidité de cet exil piloté a d’abord permis, paradoxalement, de circonscrire la potentielle influence de la révolution tunisienne sur ses voisins du monde arabe. Au-delà du caractère soudain du mouvement, et malgré les imprévus inévitables, la situation restait et reste relativement sous contrôle. L’armée, dont le commandement fut et demeure un allié des États-Unis, a su préserver une image fondamentalement positive tout en s’assurant un rôle crucial d’observateur, de médiateur et de gardien des intérêts de la nation. Un acquis de taille qui pourrait être déterminant selon l’évolution de la situation puisqu’il faut tenir compte, d’une part, des contestations vis-à-vis du gouvernement transitoire (maintenant à des postes clefs des anciens du régime - en contact avec les administrations étrangères - ) et, d’autre part, de l’organisation d’élections libres dans six mois. L’administration Obama a particulièrement bien réussi son opération et ce retour décisif sur la scène nord-africaine, et plus globalement africaine, n’est point dû au hasard ou à son penchant humanitaire et démocratique.
 
De la Côte d’Ivoire au Soudan, en passant par le Sahel et le Sud de la Méditerranée, le continent africain reste un enjeu stratégique majeur sur le triple plan de l’économie, de la géostratégie et, bien sûr, de la sécurité. L’influence européenne, et particulièrement française, traverse en ce moment une période de crise et de dé-légitimation grandissante en Afrique face à la présence américaine et chinoise. Ces dernières puissances semblent permettre aux dirigeants africains de se décentrer de la relation centenaire et difficile entretenue avec l’Europe, sa mémoire et ses intérêts.
 
Les enjeux sont conséquents. L’exploitation des matières premières reste à l’évidence un enjeu économique de taille et la découverte récente de gisements pétroliers dans le Sahel (Niger et Mali) n’est point de nature à calmer les appétits des grandes puissances. Derrière les gouvernements, les « régimes amis », les « élections troubles et troublées » et les tensions sociales et militaires, les Etats-Unis et l’Europe – avec la nouvelle présence des Chinois – se livrent à une lutte d’influence politique et économique acharnée et décisive. Le spectre du terrorisme s’est installé dans le Sahel et justifie la présence des forces occidentales amies au nom de la sécurité internationale. Les bases militaires américaines et françaises, avec des agents et experts européens et israéliens, sont engagés dans la lutte contre le terrorisme dans la région. La stratégie de surveillance et d’intervention armée est violente, brutale, sans concession : il s’agit de « tuer tous les terroristes » sans faire de prisonniers (pourquoi ?). Tous les protagonistes de l’enlèvement de deux jeunes Français au Niger ont été éliminés après que le gouvernement français ait pourtant annoncé l’arrestation de deux des kidnappeurs avant de se rétracter. Semaine après semaine des raids ont lieu et les morts (terroristes, bandits et trafiquants) se multiplient sans qu’aucun progrès ne soit enregistré. Comme s’il fallait que l’état d’alerte demeure et justifie au nom de la sécurité, la présence militaire et l’ingérence politique. Dans une région qui est devenue économiquement intéressante puisque les gisements pétroliers y sont conséquents.
 
La violente extrémiste est un fléau qu’il faut combattre, de façon claire. Il faut néanmoins ne pas être naïf et concevoir que celui-ci est parfois un épouvantail que l’on agite pour protéger d’autres intérêts. Le dictateur Ben Ali était un rempart à l’islamisme, disait-on, et cela justifiait qu’on le soutenât. Aujourd’hui le Sahel, comme le Sud Soudan d’ailleurs, sont des enjeux économiques et stratégiques réels et l’agitation de la menace islamiste, violente et extrémiste, cachent des intentions ô combien moins louables.
 
Alors que le peuple tunisien essaie de préserver les acquis de sa révolution, les puissances américaine, européenne, chinoise et russe cherchent à s’assurer un rôle en Afrique. Il faut également ne jamais oublier le rôle d’influence déterminant des services israéliens dans toute l’Afrique du Nord jusqu’au Soudan (comme l’a relevé le dernier livre de Pierre Péan, par exemple, comme d’autres enquêtes l’avaient montré au Maroc, en Algérie, au Rwanda, en Erythrée ou encore en Ethiopie). Il est question d’intérêts économiques, de sécurité et de contrôle militaire stratégique. La révolution tunisienne est aujourd’hui unanimement saluée et l’ancien dictateur voué aux gémonies, mais les calculs et les ingérences vont bon train derrière la scène des théâtres publics et médiatiques. L’administration américaine observe attentivement et n’est pas loin de l’évolution de la situation en Tunisie : elle fera ce qu’il faut pour empêcher que ses intérêts – et ceux d’Israël et de lses alliés en Egypte, en Jordanie, et au Moyen-Orient de façon générale, ne soient mis en danger.
 
A l’heure où les fronts iranien et libanais semblent monopoliser médiatiquement ce qui relèverait de la politique américaine et européenne, il est urgent de ne point minimiser cet autre front de la politique africaine et régionale. Sous peine de saluer naïvement une « révolution tunisienne » sans avoir pris la mesure de ce qu’il reste à faire encore pour lui assurer l’indépendance politique et la transparence démocratique. Et de sourire à la lumineuse victoire promise quand d’autres forces gèrent cyniquement, dans son ombre, les dividendes de leur nouvelle influence et de leurs bénéfices acquis.
 
Cette lucidité nous manque trop souvent : la lucidité des réalistes, actifs et positifs, et non les illusions des rêveurs passifs et des émotifs naïfs.
 
Source : Tariq Ramadan
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5 février 2011 6 05 /02 /février /2011 19:46

 

Le mouvement populaire tunisien a brisé un verrou, nous l’avions dit. Il y a eu un basculement, une prise de conscience : renverser les dictatures de façon pacifique est possible ! Il faut du courage, un mouvement de masse, de la détermination et de l’espoir. Une foi en Dieu et/ou en l’avenir. Sous l’étouffement et la répression, il s’agit de revendiquer une certaine idée de l’être humain et de sa dignité. Le droit irrépressible à la liberté.


Les Tunisiens ont ouvert la voie. En Algérie, en Mauritanie puis au Yemen et en Egypte des femmes, des hommes et des jeunes de tous horizons ont exprimé leur mécontentement, leur colère et leur souhait de voir leur régime respectif tomber. Partout des étincelles, des velléités, des sursauts jusqu’en Syrie où le gouvernement annonce préventivement des réformes au cas où d’étranges idées de mobilisation atteignaient le peuple.

Depuis quelques jours l’Egypte vit des troubles considérables. Après trente ans d’un règne sans partage - en ayant imposé l’état d’urgence depuis l’assassinat de Anouar al-Sadate en 1981 - Moubarak et son régime voient le peuple braver son autoritarisme et sa sanglante répression. Les forces de l’ordre et l’armée ont frappé, arrêté, torturé et tiré sur la foule en multipliant les blessés et les morts. Il fallait s’y attendre : l’Egypte n’est pas la Tunisie et le régime s’y sent davantage soutenu par l’Occident eut égard à ses alliances et à sa situation géostratégique. Certes l’administration Obama et l’Europe ont demandé à ce que le peuple ait le droit de manifester mais dans le même temps le soutien au régime et l’impérative stabilité régionale restent des priorités que l’on ne saurait négliger ou relativiser.

Rien ne se passera en Egypte et dans la région sans que les Etats-Unis (et indirectement Israël) ne cherchent à contrôler, ou à tout le moins à orienter, l’évolution de la situation. Il est difficile de penser qu’ils lâcheront le président Hosni Mubarak mais si la résistance et la contestation étaient véritablement fortes et tendaient à durer, il y a fort à parier qu’ils seront impliqués de près dans la détermination des options alternatives. Les officines américaines, israéliennes et européennes étudient déjà les scénarii dans le cas où la situation échapperait au Raïs égyptien. Un renversement n’est pas à l’ordre du jour dans l’immédiat mais tout reste possible. Dans tous les cas, il s’agit pour Washington et Tel Aviv de jouer “gagnant-gagnant” : soit avoir un président très affaibli (dont ils pourront determiner la politique), soit un nouveau régime assez soumis puisqu’ils l’auront installé depuis les coulisses. Rien n’est gagné et le processus de démocratisation sera long, douloureux et empli d’obstacles et de pièges.

Le pouvoir égyptien, comme en Tunisie, a essayé de brandir la menace islamiste en ciblant “la presence active “ des Frères Musulmans. Ce sont eux que ‘on a d’abord arrêté pour faire croire qu’ils étaient les architectes du mouvement populaire. Nul de peut nier que l’organisation, aujourd’hui illégale, demeure une force d’opposition importante. Il reste qu’elle ne mène pas le mouvement et qu’elle ne représente pas la majorité de l’opposition. Sans compter que - s’il faut à l’évidence étudier et rester critique vis-à-vis de certaines positions des Frères Musulmans et d’autres organisations islamistes légalistes et non violentes - ces organisations sont effectivement non violentes et qu’elles ont évolué sur la question de la démocratie, des femmes et de la société civile. On a vu, en Turquie, que la marge d’évolution des mouvements islamistes sur ce genre de problématiques était conséquente. Une démocratie digne de ce nom doit permettre à tous les mouvements, refusant la violence et acceptant les règles démocratiques pour tous (avant et après les elections), de s’exprimer et de participer aux débats politiques et aux élections.

Pour des raisons de géostratégie, de sécurité et de gestion du conflit israélo-palestinien, tout porte à croire que la démocratie réelle, transparente et sans corruption ni manipulation, n’est pas pour demain en Egypte. Tout y demeurera sous contrôle même si un régime plus ouvert que celui de Moubarak venait à s’installer (ce qu’il faut soutenir et espérer). Il appartiendra au peuple de poursuivre son combat pour le respect de ses droits et de sa dignité. De là où nous sommes, en Occident, il nous faudra accompagner et soutenir ces mouvements populaires en Afrique, en Afrique du Nord, au Moyen-Orient et jusqu’en Asie quand ils refusent la dictature et la repression et veulent vivre libres. C’est un devoir moral.

C’est ce que nous devons exiger de nos gouvernements occidentaux également. Le président Barack Obama a été présenté comme l’alternative à George W. Bush et à son administration, neoconservatrice et belliqueuse, et l’on attendait de lui une nouvelle façon de faire de la politique. Ce fut le cas au niveau du verbe (et quelques actions phares), sur le plan intérieur comme sur le plan international, avec le remarquable discours du Caire du 4 juin 2009. Une nouvelle ère était promise. Si l’élection de Barack Obama a permis de briser le verrou symbolique du racisme aux Etats-unis - avec l’élection du premier président afro-américain ( il s’agit encore que d’un symbole) - , on aimerait que celui-ci brise aujourd’hui le verrou de l’aveuglement américain et européen vis-à-vis du monde arabe et des sociétés majoritairement musulmanes. Il est l’heure de faire les choix des principes de justice et de liberté, de la démocratie réelle et du respect des peuples plutôt que d’entretenir ces mises en scène de soutien à la démocratisation et aux manifestations populaires alors que les systèmes sont verrouillés et que la collaboration avec les dictateurs n’est un secret pour personne. Le vrai renouveau de l’ère Obama aurait été celui-ci, au-delà des mots de respecter les peuples et non pas uniquement changer le ton et la rhétorique.

Peut-être est-il trop tôt encore. Et pourtant. Pour qui étudie l’évolution du monde en général, de l’Afrique et du Moyen-Orient et de l’Asie en particulier, il apparaît évident qu’un déplacement du centre de gravité des relations internationales est en train de s’opérer. Apparemment lentement, à l’échelle des prochaines échéances électorales aux Etats-Unis ou en Europe, mais de façon particulièrement rapide à l’aune de l’Histoire et des transformations de sociétés. Les puissances chinoise, indienne, et plus largement asiatique (sans oublier l’Amérique latine et du Sud) s’installent, dans le paysage politique autant qu’économique, et elles ne trainent pas le même passif historique que l’Occident ni ne nourrissent les mêmes rapports ni les mêmes préjugés vis-à-vis du monde arabe et des sociétés majoritairement musulmanes. Par ailleurs leur relation avec Israël est de tout autre nature que celle entretenue par les Etats-Unis et les pays européens. L’Occident ne pourra pas éternellement continuer à se tromper sans frais, ni s’entêter, en choisissant son camp sur la base de ses alliances géostrategiques et économiques aux dépens des principes humains élémentaires. Car le risque d’un bouleversement des rapports de force et des alliances pourraient à terme disqualifier peu à peu les Etats-Unis et l’Europe, et isoler Israël davantage encore. Et ce n’est pas parce qu’il s’agit uniquement de nouveaux pouvoirs et de nouvelles puissances, mais également parce que les Gouvernements des Etats-Unis, comme ceux de l’Europe et d’ Israël, ont fait le choix répété de trahir leurs propres principes humains pour privilégier leurs intérêts économiques, sécuritaires et stratégiques. Un jour l’Histoire se retourne et de nouvelles forces apparaissent qui renversent les rapports de forces et rappellent aux puissants d’hier qu’il aurait mieux valu user différemment de leur pouvoir.

Une leçon que trop de dirigeants et de gouvernements, enivrés par leurs pouvoirs dictatoriaux ou même démocratiques, apprennent malheureusement trop tard.
Source : Tariq Ramadan

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