Participant à la session de formation organisée récemment à Orsay (Essonne) par le service des relations avec l'islam (SRI) de la Conférence des évêques de France, il a, durant une semaine, découvert l'islam en France et dans le monde sous ses aspects historiques, spirituels, sociaux, culturels et religieux. Sur le terrain ou au niveau institutionnel, les contacts du monde catholique avec l'islam sont fréquents mais demeurent formels ou marqués par la méconnaissance, la peur et les clichés. Soucieux de prendre en compte cette réalité, les évêques, qui disposent par ailleurs d'un conseil pour "les relations interreligieuses et les nouveaux courants religieux", ont mis en place un groupe de travail pour réfléchir aux "types de dialogues possibles entre catholiques et musulmans". "Dans l'épiscopat, les rapports avec l'islam vont de la diabolisation à la naïveté", reconnaît un évêque, engagé dans la réflexion sur le sujet. Aujourd'hui, près de la moitié des diocèses ont un délégué chargé des relations avec l'islam. "Mais l'offre de formation n'est pas suffisante", regrette Roger Michel, prêtre et formateur. "Pourtant, la demande existe. Cette année, nous avons accueilli plus de quarante personnes contre vingt-huit l'an dernier", indique Christophe Roucou, directeur du service des relations avec l'islam. Soeur Annie, membre d'une communauté religieuse installée dans des HLM de la banlieue du Mans est venue à Orsay en quête d'une formation "plus poussée" pour "faire la part des choses entre ce qui est colporté sur l'islam et la réalité". "Jusque-là, les échanges avec mes voisins musulmans étaient terre à terre, dit-elle. Cette formation me permettra d'être plus sûre de moi pour discuter religion avec eux." "On n'a appris l'islam ni à l'école ni au séminaire, témoigne aussi André Dhélin, prêtre dans le Nord. Je le découvre sur le terrain, mais je sais bien que l'islam est plus large que ce que je peux en voir dans ma paroisse !" "Jusqu'à récemment, l'Eglise était plutôt axée sur l'accueil fraternel des immigrés. Aujourd'hui, il faut une formation pour approfondir le dialogue théologique", défend Max de Guibert, un prêtre nouvellement chargé du dialogue interreligieux dans son diocèse. QUESTIONS CONCRÈTES Plus inattendue, la présence d'un moine de l'abbaye de Cîteaux (Côte-d'Or) souligne la dimension spirituelle de l'islam. "Dieu saurait-il distinguer entre un musulman mystique et un chrétien mystique ?", lance frère Frédéric, engagé dans des échanges interreligieux, notamment avec une communauté de soufis installée près de son abbaye. Mais, pour la plupart des participants, les questions sont plus concrètes. "Dans les paroisses, on voit arriver de plus en plus de couples mixtes ; des musulmans participent aux mariages religieux. Quelle image doit-on leur donner de l'Eglise ?", s'interroge l'un d'entre eux. Faute de "savoir faire", certains curés refusent de procéder à des mariages dont l'un des conjoints est musulman. "Côté musulman, on ne sait pas à quel type d'interlocuteurs s'adresser pour résoudre ces questions", se plaignent aussi les acteurs de terrain. "Souvent, il faut baptiser les convertis en cachette car la pression sociale de leur communauté est trop forte", rapporte un prêtre. "Ce que les gens entendent de l'islam ne les incite pas à voir les choses d'un oeil positif et je suis frappé par le désarroi des familles (de culture catholique) qui voient leurs jeunes se tourner vers l'islam. Elles craignent qu'ils ne finissent terroristes", raconte un autre. Le prosélytisme réel ou supposé de certains groupes musulmans inquiète aussi. "Même dans les écoles catholiques (où les élèves de confession musulmane sont parfois majoritaires) Tous demeurent néanmoins convaincus de "l'enrichissement mutuel" que procure le dialogue entre les deux religions. Un avis qui ne fait pas l'unanimité dans l'Eglise. "Le dialogue interreligieux tel qu'il se pratique est une comédie car on n'y parle pas des points de doctrine qui nous divisent ; les musulmans ne montrent qu'un aspect des choses et ne font que la moitié du chemin", indiquait récemment au Monde le prêtre responsable des relations avec l'islam pour le diocèse de Paris, François Jourdan.
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Les visiteurs de ce site connaissent bien le premier de ces auteurs [2]
Thèse surprenante, parce que l’on considère couramment que le « revival » islamique s’oppose à la modernité et qu’il est donc réactionnaire, voire régressif. Cette vision des choses, totalement erronée pour nos auteurs, proviendrait de notre croyance dans la sécularisation de la société, croyance qui remonterait au 18e siècle, « Siècle des Lumières », et qui ne reposerait, en fait, sur rien de tangible. Evidemment, faire du réveil islamique un produit de la modernisation change complètement la vision que l’on peut en avoir.
On n’est pas très éloigné du point de vue soutenu par Patrick Haenni [3]
Les mêmes préjugés continuent à empêcher de comprendre le réveil islamique actuel – ceci alors que les « fondamentalistes » musulmans peuvent causer des troubles politiques, ils ne poseraient aucun problème basique parce qu’ils sont de simples réactions malheureuses contre la modernité venznt des parties les plus ignorantes et les plus retardées de la population de nations pas très modernisées. Tout ceci est une idiotie.
Certes, les membres de l’élite les plus occidentalisés des sociétés islamiques peuvent avoir été les plus proches de la sécularisation, mais à côté d’eux le soit disant fondamentalisme islamique a tiré ses leaders et une grande partie de son soutien des membres les plus éduqués et les plus privilégiés et ce n’est donc pas un mouvement réactionnaire des « masses » (248).
[1] Rodney Stark et Roger Finke,Acts of faith, Explaining the human side of religion, University of California Press, 2000
[2] cf. Le christianisme à l’origine du capitalisme, dans la rubrique Christianisme
[3] cf. L’islam de marché est en marche, dans cette même rubrique
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Thèse surprenante, parce que l’on considère couramment que le « revival » islamique s’oppose à la modernité et qu’il est donc réactionnaire, voire régressif. Cette vision des choses, totalement erronée pour nos auteurs, proviendrait de notre croyance dans la sécularisation de la société, croyance qui remonterait au 18e siècle, « Siècle des Lumières », et qui ne reposerait, en fait, sur rien de tangible. Evidemment, faire du réveil islamique un produit de la modernisation change complètement la vision que l’on peut en avoir.
On n’est pas très éloigné du point de vue soutenu par Patrick Haenni [3]
1) l’islam sert couramment comme base institutionnelle de nationalisme et d’opposition au colonialisme – aux plans politique, culturel et économique.
Comme David Martin l’a expliqué : « La plupart des sociétés islamiques ont subi des conditions semblables à celles de l’Irlande et de la Pologne, étant assujetties à un contrôle et à une influence étrangères. Ceux qui répandent les versions des Lumières non seulement n’ont aucune base originelle dans l’histoire interne des sociétés islamiques mais ils propagent une idéologie dont la base originelle fait partie de l’histoire de l’Europe chrétienne et colonialiste.
La religion crée une relation entre les gens et établit un lien avec un passé triomphaliste, tandis que la sécularisation est venue avec la dépendance, la faiblesse et l’infiltration étrangère. Aussi l’intelligentsia, partie prenante au mouvement contre le colonialisme, était sensible à des définitions fortes de leurs taditions originelles qui mettaient l‘accent sur la pureté et l’intégrité islamiques. Ils avaient l’intention de se moderniser selon leur propre voie et la seule voie suffisamment enracinée dans leur histoire multi séculaire était islamique [4]
2) En plus de servir les nations islamiques exactement de la même façon que la piété catholique a servi la Pologne, le Québec et l’Irlande, l’islam a ajouté l’avantage de n’être pas monolithique.
Assurément, les croyances non islamiques sont hors la loi dans beaucoup de société islamiques, et parfois une branche de l’islam en persécute une autre. En général, cependant, des conditions d’un marché relativement libre prévalent en islam, laissant libre cours à la compétition de groupes islamiques concurrents - un niveau de compétition qui est tout à fait suffisant pour générer un haut niveau d’engagement religieux [5].
Ici la comparaison doit se faire avec les firmes chrétiennes dans l’économie religieuse américaine. Alors qu’il y a un grand nombre de groupes religieux non- chrétiens aux Etats-Unis, en termes d’inscription ils sont insignifiant et ne pas en tenir compte ne ferait pas de différence dans l’appréciation des hauts niveaux de religiosité en Amérique.
La même chose s’applique à l’islam dans le sens que nous ne devons pas chercher la diversité d’abord en termes de fois non musulmanes, mais à l’intérieur des frontières de l’islam lui même . Et à l’intérieur de l’islam, l’état normal des affaires est le pluralisme.
Etant donné les liens serrés non habituels entre l’église et l’Etat qui ont caractérisé les sociétés islamiques pour la plupart de leurs historiens, la pluralisme islamique a été « une réalité sociologique longtemps cachée par un pouvoir autoritaire qui ne pouvait pas s’accorder à lui sans menacer sa propre survie » [6]. Durant les siècle passé ou à peu près, le pluralisme islamique s’est manifesté ouvertement dans beaucoup de sociétés et a généré le même degré de mobilisation de masse que celui produit par le pluralisme [religieux] aux Etats-Unis.
Finalement, les recherches montrent que plus l’environnement religieux est non régulé et concurrentiel, plus nombre sont les musulmans prêts à entreprendre leur pèlerinage à La Mecque (249)
[1] Rodney Stark et Roger Finke,Acts of faith, Explaining the human side of religion, University of California Press, 2000
[2] cf. Le christianisme à l’origine du capitalisme, dans la rubrique Christianisme
[3] cf. L’islam de marché est en marche, dans cette même rubrique
[4] David martin, 1991, "The Seculairisation issue : Prospect and Retrospect". British Journal of Sociology 42, p. 472
[5] C’est la thèse - remarquable - des auteurs que la concurrence sur le « marché » des religions améliore, comme sur tout autre marché, la qualité des produits et des services
[6] Niandou-Souley, Adoulaye, and Gado Alzouma. 19996."Islamic Renewal in Niger :From Monolith to Plurality". Social Compass 43, p. 255
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Les visiteurs de ce site connaissent bien le premier de ces auteurs [2]
Thèse surprenante, parce que l’on considère couramment que le « revival » islamique s’oppose à la modernité et qu’il est donc réactionnaire, voire régressif. Cette vision des choses, totalement erronée pour nos auteurs, proviendrait de notre croyance dans la sécularisation de la société, croyance qui remonterait au 18e siècle, « Siècle des Lumières », et qui ne reposerait, en fait, sur rien de tangible. Evidemment, faire du réveil islamique un produit de la modernisation change complètement la vision que l’on peut en avoir.
On n’est pas très éloigné du point de vue soutenu par Patrick Haenni [3]
Etudiant les musulmans de Java, Joseph Tamney [4] a trouvé que l’engagement religieux y était positivement corrélé avec l’éducation et des situations de prestige. C’est-à-dire : il y avait plus de chances pour que des gens qui ont été au collège ou occupé des positions de haut standing prient cinqa fois par jour, donne des aumônes, jeunbent en accord avec la pratique islamique orthodoxe que des musulmans de peu d’éductaiuon ou occupant des emplois de peu de prestige. Tamney a aussi trouvé que la pratique musulmane augmentait avec la modernisation. Dans son livre suivant [5] , Tamney a analysé la « résilience » de la religion : comment elle a été capable de s’adapter aux défis de la modernité. (75)
Une étude du mouvement « fondamentaliste » au Pakistan montre que les leaders sont hautement éduqués (tous ayant des diplômes supérieurs) et que les supporters du mouvement sont tirés pour la plupart de la nouvelle classe moyenne [6] . Cela est confirmé par des données concernant les étudiants turcs. Depuis 1978, il y a eu un accroissement remarquable dans le pourcentage des étudiants de l’Université d’Ankara tenants d’une foi islamique orthodoxe, et en 1991, l’écrasante majorité des étudiants se situaient dans cette mouvance. En 1978, 36 % des « étudiants exprimaient la ferme croyance que « il y a un Ciel et un Enfer », tandis qu’en 1991, les trois quarts partageaient cette vision des choses. Même observation chez Kayan Mutlu [7]. Ces étudiants seront les futurs leaders politiques et intellectuels de la nation, y compris les ingénieurs et scientifiques. De plus, la Turquie par la plupart des indices est la plus modernisée des nations islamiques et, depuis les années 1920, a expérimenté des décennies d’irréligion séculière officielle et semi officielle [...]. De la même façon, il y a eu des changements brutaux en faveur de la piété islamique parmi les étudiants au Nigéria, en France et au Sénégal, remplissant la place laissée vacante par le marxisme.
Bien sûr, ces données sur l’islam sont fragmentaires. Mais aucun observateur informé n’a besoin de telles données pour détecter la formidable vitalité de l’islam contemporain et pour se rendre compte qu’il est en relatioin directe avec la modernisation. (75)
[1] Rodney Stark et Roger Finke,Acts of faith, Explaining the human side of religion, University of California Press, 2000
[2] cf. Le christianisme à l’origine du capitalisme, dans la rubrique Christianisme
[3] cf. L’islam de marché est en marche, dans cette même rubrique
[4] Tamney, Joseph B. 1979. "Rstablished Religiosity in Modern Society : Islam in Indonesia." Sociologivcal Analysys, 40
[5] Tamney 1992, The Resilience of Christianity in the Modern World, Albany : State University of New York Press
[6] Ahmad Munmtaz. 1991. Islamic Fundamentalism in South Asia : The Jamaat-i-Islamiu and the Tablighi Jamaat of South Asia." in Fundamentalisms observed, edited by Martin E. Marty ad R. Scott Appleby. Chicago : University of Chicago Press
[7] Mutlu Kayan. 1996. "Examining Religious Beliefs among University Students in Ankara", British Journal of Soc iology, 47
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En même temps est éclairée d’une sombre lumière la haute figure de Massignon, restée en grande partie énigmatique. Le grand orientaliste a oeuvré pour le rapprochement des cultures chrétienne et musulmane. Marié après une jeunesse sexuellement aventureuse, il désirera de toute ses forces devenir prêtre, demandant une audience privée à Pie XII pour plaider sa cause.
Au grand dam du Pape, il obtient finalement à l’âge de 67 ans, son ordination de l’Eglise melchite, le 28 janvier 1950, à Sainte-Marie-de-la-Paix, au Caire, ce qui convient à son ardent désir de prier en arabe, mais l’ordination doit rester secrète et il lui est interdit de dire la messe en public.
Hanté par al-Hallâj qui le ramène dans la foi du Christ, Louis Massignon considère que le libre examen n’est que la luxure de l’esprit. C’était une époque où le pape Léon XIII, pape dénonçait le « vice capital du libéralisme », enseignant que la liberté accordée à tous n’était pas désirable par elle-même « puisqu’il répugne à la raison que le faux et le vrai aient les mêmes droits ».
Louis avait cessé toute pratique sacramentelle depuis cinq ans. Entre 1906 et 1908, son amant égyptien l’avait initié à l’amour du même sexe. Il croit encore que Hallâj al-assâr (le « cardeur » des consciences) avairt une doctrine christianisante, et décide de consacrer sa thèse à ce personnage, car il veut mettre en lumière sa doctrine de la divinité du Christ, si imprévue dans l’islam – née pour lui, du besoin d’un guide impeccable, possédant la « plénitude de l’Esprit » - pour ne pas errer dans les voies mystiques : doctrine si curieusement récompense par une mort ignominieuse en croix, qu’il paraît nettement avoir désirée. » Certes, il finira par reconnaîttre que al-Hallâj est bien mort fidèle au Coran, lais il n’en reste pas moins plausible que c’est le mystique musulman qui l’a ramené dans la foi du Christ.
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En même temps est éclairée d’une sombre lumière la haute figure de Massignon, restée en grande partie énigmatique. Le grand orientaliste a oeuvré pour le rapprochement des cultures chrétienne et musulmane. Marié après une jeunesse sexuellement aventureuse, il désirera de toute ses forces devenir prêtre, demandant une audience privée à Pie XII pour plaider sa cause.
Au grand dam du Pape, il obtient finalement à l’âge de 67 ans, son ordination de l’Eglise melchite, le 28 janvier 1950, à Sainte-Marie-de-la-Paix, au Caire, ce qui convient à son ardent désir de prier en arabe, mais l’ordination doit rester secrète et il lui est interdit de dire la messe en public.
Hanté par al-Hallâj qui le ramène dans la foi du Christ, Louis Massignon considère que le libre examen n’est que la luxure de l’esprit. C’était une époque où le pape Léon XIII, pape dénonçait le « vice capital du libéralisme », enseignant que la liberté accordée à tous n’était pas désirable par elle-même « puisqu’il répugne à la raison que le faux et le vrai aient les mêmes droits ».
Beaucoup de ces lettres sont de la même encre, à la fois noire et limpide, trahissant la violence d’une intelligence contrariée. « J’espère [...] être redevenu plus simple. La simplicité est une chose exquise, quand on la possède sans s’en douter, ce qui est rare ». Ou encore : « J’arrive mal à me maintenir en ce juste milieu où les humiliations conduisent à [cette vertu la plus difficile à acquérir] l’humilité. »
Par chance, la mère du jeune homme veille au grain. Chaque jour, elle prie pour remercier Dieu de la « grâce de la conversion de Louis », et surtout pour qu’il lui envoie « la compagne de sa vie, chrétienne et affectueuse » [...]. Cette prière finira par être exaucée puisque Louis convolera en « justes noces » cinq ans plus tard.
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En même temps est éclairée d’une sombre lumière la haute figure de Massignon, restée en grande partie énigmatique. Le grand orientaliste a oeuvré pour le rapprochement des cultures chrétienne et musulmane. Marié après une jeunesse sexuellement aventureuse, il désirera de toute ses forces devenir prêtre, demandant une audience privée à Pie XII pour plaider sa cause.
Au grand dam du Pape, il obtient finalement à l’âge de 67 ans, son ordination de l’Eglise melchite, le 28 janvier 1950, à Sainte-Marie-de-la-Paix, au Caire, ce qui convient à son ardent désir de prier en arabe, mais l’ordination doit rester secrète et il lui est interdit de dire la messe en public.
Hanté par al-Hallâj qui le ramène dans la foi du Christ, Louis Massignon considère que le libre examen n’est que la luxure de l’esprit. C’était une époque où le pape Léon XIII, pape dénonçait le « vice capital du libéralisme », enseignant que la liberté accordée à tous n’était pas désirable par elle-même « puisqu’il répugne à la raison que le faux et le vrai aient les mêmes droits ».
En même temps est éclairée d’une sombre lumière la haute figure de Massignon, restée en grande partie énigmatique. Le grand orientaliste a oeuvré pour le rapprochement des cultures chrétienne et musulmane. Marié après une jeunesse sexuellement aventureuse, il désirera de toute ses forces devenir prêtre, demandant une audience privée à Pie XII pour plaider sa cause.
Au grand dam du Pape, il obtient finalement à l’âge de 67 ans, son ordination de l’Eglise melchite, le 28 janvier 1950, à Sainte-Marie-de-la-Paix, au Caire, ce qui convient à son ardent désir de prier en arabe, mais l’ordination doit rester secrète et il lui est interdit de dire la messe en public.
Hanté par al-Hallâj qui le ramène dans la foi du Christ, Louis Massignon considère que le libre examen n’est que la luxure de l’esprit. C’était une époque où le pape Léon XIII, pape dénonçait le « vice capital du libéralisme », enseignant que la liberté accordée à tous n’était pas désirable par elle-même « puisqu’il répugne à la raison que le faux et le vrai aient les mêmes droits ».
Ce texte est proche des propres mots du Hallâj « Ma mort, c’est de [sur]vivre, et ma vie c’est de mourir. Je sens que l’abolition de mon être est le plus noble don à me faire, et ma survie tel que je suis le pire des torts. Ma vie a dégoûté mon âme parmi ces ruines croulantes. »
Les mots ultimes du martyre musulman méritaient eux-mêmes d’être cités : « Or, ceux-là qui sont tes serviteurs se sont réunis pour me tuer par zèle pour Ton culte et par désir de se rapprocher de Toi. Pardonne-leur, car si Tu leur avais dévoilé ce que Tu m’as dévoilé, ils n’eussent pas agi comme ils ont agi.’ » Comment Massignon aurait pu ne pas les rapprocher des dernières paroles du Christ ?